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   la doctrine de Luther en un code de dogmes, ce n'est pas dans
   cette œuvre ainsi dénaturée que nous pouvons retrouver la
   mission utile du docteur. Son importance sociale consiste
   dans l'idée même qui la dicta. Quant aux faits qui la suivirent,
   quant à l'insurrection organisée contre Rome, quant à cette
   haine profonde qui amena une scission sans espoir de rappro-
   chement , tout cela fut une conséquence forcée du caractère
   passionné de l'homme, et de celle logique inexorable des
   masses qu'on ne peut pas toujours maîtriser. Il faut regretter
   de tels résultats, et ne pas rejeter leurs principes. Les excès
  de la nature humaine ne doivent pas nous porter à la blas-
  phémer. Si l'intelligence arrive à l'erreur en suivant trop loin
  le rayon de la vérité, ce n'est point un motif pour la repousser
  sans discussion, ce n'est point un motif pour la condamner à
  l'avenir ; il faut la soumettre à une analyse plus patiente, à
  une surveillance plus sévère.
     L'indépendance de l'esprit étant reconnue, quand il agit et se
 restreint dansles limites de la conscience, la réforme nous appa-
 raît tout de suite comme un faitnécessaire. Nous regrettons que
 cette réforme ait c\è protestante. Opérée avec autant de fermeté,
 mais plus de modération ; s'accomplissant tout en s'élevant
 contre les abus de l'autorité, elle pouvait admettre l'autorité
 elle-même. Si elle n'eût pas réveillé les mauvaises passions
 des hommes, ni appelé à son aide les brutaux instincts des
 peuples, elle eût été maîtresse de son triomphe, elle se fût
 arrêtée à temps. Toute transaction n'aurait pas été impos-
 sible. Le catholicisme eût été modifié quant à sa forme pas-
sagère et temporelle, mais il eût conservé sa grande unité eu-
ropéenne ; il n'eût pas eu le regret de perdre une partie de sa
 domination intellectuelle et morale, ni de livrer à tous les
écarts, à toutes les intempérances de la faiblesse individuelle,
des pays brisés aujourd'hui en imperceptibles atomes de sectes
philosophiques et religieuses.
    D'ailleurs, la liberté de l'intelligence serait-elle donc inconci-
liable, clans le dogme catholique, avec la foi et la grâce? « Ne