Revue du Lyonnais » série 1 - n°10 ( 1839 ) » pp.265

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était portée par les gardes du cardinal, qui, nu-tête, durant
toutle voyage, se relevaient d'heure en heure et se disputaient,
en quelque sorle^ l'honneur d'ainsi transporter ce corps frêle
et maladif.
    « M. de Cinq-Mars entra à Lyon le 4 septembre de celte
 année (1642), sur les deux heures après midi, dans un carosse
 traîné par quatre chevaux. Il y avait auprès de lui quatre gar-
 des du corps, mousquet sur le b r a s , l'œil fixé sur la portière
 et mantelets. Cent hommes des gardes à pied de M. le cardinal-
 duc entouraient le carosse, que précédaient deux cents cava-
 liers catalans ; il était suivi de plus par trois cents autres bien
 montés et armés jusqu'aux dents. M. Le Grand était vêtu d'un
 pourpoint de drap de Hollande, couleur de musc, tout brillant
 de dentelles d'or, avec un manteau d'écarlate à q u e u e , et à
 gros boutons d'argent. Ses cheveux flottaient à longues bou-
 cles sur ses épaules. Comme il traversait le pont du Rhône,
 il demanda à M. de Séton (1), lieutenant aux gardes, qu'on
 abattît les mantelets des portières, ce qui lui fut refusé. Il prit
 alors ce refus de bonne façon, saluant le peuple et ses n o m -
 breuses connaissances par l'une et l'autre portière, avec une
 grâce c h a r m a n t e , jusqu'à ce qu'il fut arrivé au pied du châ-
teau de Pierre-Encise. Ici on le fit m o n t e r a cheval. Sa prison
 était au bas de la grande tour du château. Deux fenêtres étroi-
tes, au dessous desquelles on avait placé un corps-degarde ,
lui donnaient vue sur un petit jardin seulement. M. de Séton
 couchait dans sa chambre avec quatre hommes ; l'arrière-
 chambre et les avenues étaient toutes très sévèrement gardées.
 M. le cardinal Bichy vint le visiter le 5, et, sur le désir de
M. Le Grand, qui voulait quelqu'un pour le distraire dans sa
prison, on lui envoya le lendemain le P. Malavalette, jésuite.
 Celui-ci s'y rendit à cinq heures du matin. Il trouva M. Le
Grand dans un lit de damas incarnat, d'une grande somptuo-
sité, incommodé d'un dérangement d'estomac qui le rendait


  (I) D'autres récils portent de Geton , par un C,