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229 mènent au fond d'une vallée solitaire la vie la plus pure et la plus douce, mais qui verront leur bonheur finir bien vite. La morl, cette faucheuse terrible, tranche devant elle tout ce qui respire, et, quand sa mission se trouve finie, quand il n'y a plus rien à glaner, elle devient à elle-même sa mort. Le Christ apparaît; il élend sur les mondes une croix qu'il tient à la main, et cetle immense foule se partage aussitôt en deux. La séparation est faite, l'arrêt est exécuté et l'univers n'existe plus. Le poète sort de son rêve, et s'éveille baigné d'une froide sueur. Voilà quelle est l'économie de ce poème élégiaque, peu neuf quant au fond, mais offrant des peintures originales, des images hardies, des traits saillants et quelques concep- tions saisissantes. Les adieux que l'ange conducteur adresse à sa planète, sont un morceau noblement écrit et grande- ment pensé ; l'épisode de ce jeune couple qui se promet des jours heureux et purs, au moment où ses rêves de bon- heur vont finir dans les ruines de toutes choses, nous offre un gracieux contraste avec ce qui l'entoure, et un doux ta- bleau où l'oeil se repose un instant avec amour. C'est une touchante idée, une idée tendrement chrétienne que de nous montrer tout en deuil celte mère qui n'aura qu'une incom- plète félicité si, au sortir des flammes expiatoires, elle n'em- mène avec elle son malheureux enfant. Mais d'un autre côté je portais mes regards, Et je vis une femme aux longs cheveux épars; Le charme de ses yeux faillit troubler mon ame; Leur éclat brillait même à travers cette flamme, Jamais les doigts divins n'avaient, en si beau corps, Assoupli la matière à de si doux accords; Au repentir amer dont sa voix était pleine, Je vis qu'elle avait eu les jours de Magdeleine, Et que, dans les attraits dont le ciel l'embellit, S'était trouvé l'écueil où sa vertu faillit. Son cœur jeune et brûlant d'une ardeur sans mesure, Au lieu du créateur choisit la créature,