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56 celles de Poitiers et de Saint-Gilles. Quoique les dessins dont nous parlons ne soient que des croquis et de simples traits, on y reconnaît une grande facilité d'invention, un sen- timent du pittoresque peu commun dans ces siècles reculés, et, malgré la disproportion des figures, beaucoup d'adresse et de netteté. Le sujet est ordinairement bien rendu, sans faux traits, avec franchise et hardiesse. L'artiste ne s'est pourtant pas fié sur sa fidélité à reproduire le texte, car il a accompagné ses groupes de légendes explicatives en prose. « On ne doit point s'attendre à trouver dans celte Psycho- macliie un livre de luxe comme les missels et les bréviaires du même siècle, aux vignettes peintes et dorées, aux couver- tures d'ivoire ciselé, et aux fermoirs d'or incrustés de saphirs. Quelques rubriques, une seule initiale verte, un petit nombre de traits de minium semés sur les figures, voilà tous les moyens dont l'artiste s'est servi pour rehausser ses illustrations. Les des- sins, nous le répétons, ne sont ici qu'une explication du texte, une esquisse d'un autre travail plus grand peut-être, mais une esquisse ferme et spirituelle, moins remarquable par son fini que par ses intentions, moins intéressante encore par son sentiment artistique que par les documents qu'elle nous livre sur la vie et les costumes du milieu du XII e siècle. Nous avons assimilé ce manuscrit à une basiliqne romane ; cette comparaison serait encore juslifiée par l'aspect du premier de ses dessins, lequel représente le Christ assis au milieu d'une veska piscis, entouré de ses apôtres et de ses élus. Aux matériaux près, on croirait voir un de ces portails sculptés que la piété élevait dans le midi de la France, à l'é- poque qui précéda immédiatement l'ère ogivique. » Ce manuscrit de Prudence ne va pas tout-à -fait jusqu'à la fin du poème ; nous pensons qu'on rendrait un éminent service aux artistes en publiant un fac-similé de ses dessins. Les bibliothèques de Lyon possèdent beaucoup d'autres t r é - sors de ce genre, qui n'attendent, pour être admirés du public,