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laisse à l'homme sa liberté dont je souhaite qu'il use bien, je
laisse à Dieu sa providence dont nos efforts doivent mériter
les faveurs ; je laisse au monde ancien son fatum et sa dure
nécessité toute chargée de ses emblèmes de fer.
   Avec le plan que j'adopte, je ne puis même pas faire allusion
aux diverses méthodes historiques, je n'ai pas dû parler des
différentes branches de la science historique, les anecdotes,
les biographies, les mémoires, les annales,ouvrages souvent
utiles, qui jettent du jour sur quelques points isolés d'une
époque, mais ce n'est là qu'une lampe qui éclaire, les uns après
autres, les coins de l'édifice, et nous cherchons le soleil qui les
illumine tous à la fois d'un seul jet de sa lumière.
   L'histoire est donc l'étude consciencieuse, la science critique
du passé, appliquée à la connaissance de l'homme et des lois
qui régissent l'humanité.
   Cette définition de l'histoire n'appartient et ne pouvait a p -
partenir qu'au temps présent; avant d'arriver à cette dernière
transformation, l'histoire a dû subir bien des changements,
passer par des phases nombreuses : on a dit que l'histoire est de
toutes les sciences celle qui naît le plus tôt, et se développe le
plus tard ; cela est vrai : l'histoire commence avec l'homme ;
les premières pensées, les premières actions de l'homme, c'est
déjà de l'histoire. Expression fidèle de la pensée du monde à
son malin, l'histoire s'est d'abord appelée poésie. La recon-
naissance, l'admiration instinctive de l'homme a dû éclater
par des chants d'amour, par des aspirations spontanées. Tout
est poésie pour un peuple enfant sorti des mains de Dieu!
Théologie, philosophie, histoire, tout avait revêtu cette robe
blanche et gracieuse, tout s'était imprégné des parfums déli-
cieux qui nous font tant regretter les doux rêves de l'enfance;
où nous discutons, ils admiraient; où nous raisonnons, ils
s'enthousiasmaient; où nous examinons, ils chantaient: orga-
nisations harmonieuses qui charmaient, une lyre à la main, le
voyage de la vie ! Natures neuves et aimantes, que de vifs
transports élevaient incessamment vers le ciel et dont la vie
 n'était qu'un magnifique hosannah !