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étaient chers ; mais il adorait la sculpture et fi'eu parlait
jamais qu'avec enthousiasme. Elle était pour lui l'objet
d'une passion fougueuse, d'un culte de cœur et d'ame ; à ses
yeux, rien d'aussi beau que l'art; d'aussi grand qu'un grand
artiste. Bien qu'il se fût créé une manière à lui, jamais il
n'imita ces despotes qui s'efforcent d'imposer la couleur de
leur talent, et souvent de leur médiocrité, au jeune peuple
qu'ils régentent. Lorsque ses souffrances lui permettaient
de professer, tous les élèves, peintres et sculpteurs, l'abor-
daient avec une sorte de vénération ; chacun voulait recueillir
de sa bouche quelques-unes de ces observations lumineuses
qu'il prodiguait avec bonté, et que son esprit vif et piquant
savait faire ressortir par mille expressions originales, Oui,
c'était un grand artiste ; il n'eut qu'un seul tort, ce fut d'enfouir
 son génie à Lyon.
   Madame Chinard, sa veuve, possède un nombre considé-
rable de terres-cuites laissées par son mari. H en est qui ravi-
raient en extase nos amateurs de statuettes ; mais deux sont
plus particulièrement dignes d'intérêt, en ce sens que l'une
est la reproduction exacte de l'allégorie qui faillit coûter si
cher à l'auteur, dans la ville p a p a l e ; l'autre, cette justice
dont l'aparition subite arracha l'artiste à la mort qui l'atten-
dait au sortir de la mauvaise cave.
   Où passeront ces marbres, ces trophées, ces esquisses dé-
licates, ces rares et vieux plâtres apportés d'Italie ? Que de-
viendront les précieux vestiges d'un talent dont les Lyonnais
d'aujourd'hui devraient se montrer fiers ? souffriront-ils que
le modèle de Cervoni s'en aille pourrir, verni et badigeonné,
au fond de quelque jardin obscur ? Cela n'est que trop p r o -
bable, mais c'est aussi trop pénible à prévoir : espérons en-
core. Peut-être qu'un jour les portiques du palais Saint-Pierre
s'ouvriront à des objets non moins intéressants, ce nous sem-
ble^ que tant de fragments lumulaires dont l'unique avantage
est de confirmer ce que personne assurément ne conteste,
savoir : Qu'il y eut autrefois des Romains dans les Gaules.
                                        Arthur GUILLOT.