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279 des prisonniers un procès particulier, qu'un registre de dé- nonciations était ouvert dans les sociétés populaires, et que le relevé de ces registres était sous les yeux du tribunal de sang. Je savais que le noms de tous les prisonniers avaient été envoyés aux sociétés populaires, aux sections, pour ap- peler les dénonciations ; je savais enfin qu'il n'y avait de mon âge aucun membre de la famille de Grolier, et qu'on ne pren- drait pas la peine de s'enquérir à Bordeaux s'il y avait un garçon maréchal de ce nom. On m'oubliait en prison ; j'avais vu renouveler toutes les chambrées : je m'avisai d'écrire au tribunal pour demander à être jugé. Les phrases à l'ordre du jour ronflaient dans ma pétition ; elle avait cinq grandes pa- ges, et je l'avais terminée par : a fait sa croix, ne sachant signer... » Quelques jours après, M. Grognier fut transféré dans une des caves de l'Hôtel-de-Ville, où il fut interrogé. Il déclara être un garçon maréchal, fils de feu Jean Grolier, domestique à Bor- deaux; qu'il s'était arrêté à Lyon en faisant son tour de France, et qu'il avait travaillé chez M. Falconnet, maître maréchal. Il fit prévenir M. Falconnet, qu'il connaissait pour un brave h o m m e ; et celui-ci, i n t e r r o g é , déclara devant le tribunal qu'il avait eu chez lui un ouvrier qu'on appelait Bordelais-la- Jeunesse, et dont il ignorait le vrai nom. Grolier, acquitté et incorporé dans les chasseurs de la Montagne, partit pour la Vendée , où il servit comme vétérinaire. Ayant e m b r a s s é , sans vocation déterminée, l'élude de la médecine des animaux, M. Grognier n'avait jamais cru la pour- suivre toute sa vie. Pendant le siège, il pensait l'avoir aban- donné pour toujours, et il n'était pas le seul. « Comme on croyait au triomphe durable de la cause lyonnaise, on me préjugeait de hautes destinées. Heureusement pour l'écono- mie rurale, ces prédictions ne se réalisèrent pas. » Peu de temps après avoir quitté L y o n , le chasseur de la Montagne reprend pour toujours la culture des sciences. A l'avenir, la politique ne sera pour lui qu'un hors-d'œuyre, n'occupant