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« de Dieu. » Le Chartreux qui l'avait habitée venait de
mourir. Les robes de laine suspendues au chevet de son
modeste lit se balançaient au souffe de l'air comme la dé-
pouille d'une crysalide qui vient de prendre son essor.
C'était le plus jeune de la communauté, trop faible pour
supporter la vie dure qu'il s'était imposée il avait suc-
combé. Sur deux os de mort disposés en croix il avait écrit
d'une main tremblante ces mois qui respirent toute une
douloureuse agonie : « Oui, mon Dieu !... oui !... soit tout
» de suite, soit en détail!... » Dieu prit pitié de ses souf-
frances et l'appela tout de suite à la grande joie de tous ses
frères, car dans ces murs la mort seule peut amener un jour
de fête. Sur sa table, au milieu de différents papiers que
je n'ai pas lus, se trouvaient deux chapelets : l'un terminé,
l'autre interrompu parla mort à sa seconde dixaine.... Ils
m'ont été donnés par le général don Jean-Baptiste Mortez
qui les a bénis et indulgenciés.
   Le pèlerinage qae j'accomplis ainsi tout seul, maladif et
à pied, dans la plus âpre saison de l'année, est empreint
d'un caractère indéfinissable de tristesse et de douceur.
J'écoute et vois vraiment avec religion toutes ces choses
religieuses. La tourmente qui fatigue inutilement les
vitraux et pénètre en sifflements aigus dans ces immenses
corridors sans en troubler le calme, tant le calme en est
grand, fait comparer de la façon la plus naturelle la vie
tranquille et confiante des Chartreux à notre époque in-
quiète et sceptique. Dois-je à une illusion, qui naît des
émotions que j'éprouve, de voir si différemment que les
joyeux visiteurs de l'été le couvent de la Grande Char-
treuse? d'apprécier autrement ses croyances? de recevoir
autrement sa simple hospitalité? — Non, il est plus vrai
de dire que, plus en harmonie avec l'esprit de ses mélan-