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trop d'humiliations, beaucoup de Français, résolus de s'en
garantir, cherchèrent hors de leur pays sûreté et repos.
La plupart gagnèrent les contrées libres des Etats-Unis
d'Amérique. Où pouvaient-ils mîeux trouver la paix et la li-
berté, où se seraient-ils mieux consolés des crimes du despotis-
me européen que dans la patrie deWasinghton, de Franklin,
de Jefferson. Le Gouvernement et les habitants les ac-
cueillirent avec empressement. De son côté, le congrès
vota immédiatement l'abandon de cent mille arpents de
tei're en faveur des émigrans.
    Le plus grand nombre était dépourvu de ressources, il
fallait donc qu'il se créât des moyens de vivre; mais quelle
existence chacun pouvait-il se former s'il était réduit à ses
efforts individuels. Tous avaient enduré les revers les
plus cruels, demeuraient soumis aux tortures morales les
plus pénibles. Quelle consolation, quels encouragements
devaient-ils espérer loin de leur patrie, s'ils se soumettaient
à l'isolement, source fréquente du désespoir! Chacun sentant
sa propre impuissance à s'assurer contre toute chance de
besoin matériel et comprenant, en outre, qu^il lui fallait
antre chose qu'une vie végétative, la pensée d'association
se fixa dans tous les esprits. En mettant en commun force,
volonté, douleur, avenir, on pouvait se créer une existence
positive, une patrie nouvelle. L'accomplissement de cette
idée promettait au Français toujours une main amie à
presser, toujours un cœur prêt à battre comme le sien à
mille souvenirs de gloire et de nationalité.
    Les généraux Lallemant étaient au nombre des proscrits.
L'aîné des frères, condamné à mort par l'un des conseils
de guerre de Paris, avait été victime de cet incroyable
acharnement que la Restauration mit à poursuivre sans
relâche dans toute l'Europe et jusqu'en Asie plusieurs de