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412 talions régnent l'ordre , l'aisance , l'élégance , la propreté , et en même temps la plus touchante économie. De gais refrains remplissent les longs échos qui les entourent, et le cœur riche de jeunesse secoue le joug des noires pensées. L'amour de la propriété a jeté ici de profondes racines et fait de grands p r o - grès. Ce sentiment se réalise sans cupidité ; le cultivateur éco- nome fait consister toute son ambition , ou à devenir proprié- taire ou à agrandir l'héritage de ses p è r e s . Dans une belle et pure soirée du mois de m a i , je parcourai le côté septentrional du Mont-d'Or , couronné en quelques endroits d'une forêt fruitière. Là , le mélange étonnant de la nature sauvage et de la nature cultivée, montre partout la main de l'homme. En quelques endroits les collines sont creu- sées d'immenses carrières de pierres, d'où sont sortis les m o - numents prodigieux qui embellissent la cité de Plancus. Cé- dant à mes penchants rêveurs , j'errai près de la colline de Verdun , et me perdis avec une joie mélancolique et ravis- sante sous les ombrages d'un bosquet de noisetiers, non loin d'un sommet près duquel quelques arbres gigantesques for- ment comme une chevelure sur un front c h a u v e , tantôt lais- sant aller mes vagues pensées à la suite des légers nuages qui traversaient les cieux , tantôt les ramenant sur les fleurs dont la terre était parsemée. Je finis par ne plus regarder ni la t e r r e , ni les cieux; rêvant toujours sans savoir où j'allais, j'arrivai ainsi au bord d'une petite source creusée sous un rocher. Je m'assis sur une pelouse veloutée, et regardai cou- l e r , sur des cailloux mousseux, le petit ruisseau, emblème d'une vie e r r a n t e , et suivai d'un œil rêveur les feuilles ou les débris de rameaux que les flots emportaient. Une foule de sensations nouvelles et fugitives que j'éprouvais , n'étaient pas sans charme. Je m'amusai à contempler le rosier sau- v a g e , le cytise, le roseau et l'arbuste aimé du berger , qui bordent de toutes parts le cours des sources et des fontaines. Je remarquai que souvent, au défaut de l'onde épuisée, ces arbrisseaux p a r f u m é s , dessinent dans les vallons comme des