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29 « lire, écrire et compter, et elle est bien bonne fille. Je n'ai « point d'autre enfant; elle aura tout mon bien. Tel que vous » me voyez, je suis riche, m o i ; j'ai une maison, j'ai des « terres , et tous mes biens valent douze mille francs. Si « vous voulez, menez-moi chez un notaire, je lui donnerai « de suite tout ce que je possède. Cet homme que vous voyez « là n'est pas son p è r e , mais c'est moi qui suis son p è r e , « c'est mou enfant, je ne veux pas mourir loin d'elle; ne « me l'ôtez pas !!! » E t , en parlant ainsi, il sanglottait et des larmes abondantes coulaient dans les sillons de son visage. Je ne sais si ce simple récit vous fait partager l'émotion qui s'empara de m o i , mais ce que je puis d i r e , c'est que je me retirai, profondément affligé de ne pouvoir calmer une si vive douleur. Peu de jours après je fus consolé, le père n a t u r e l , celui qui avait, quinze ans auparavant, exposé son enfant, la vendit au vieillard ; pour quelques pièces d'or, il reconnut d'autres droits bien autrement sacrés que les siens, et la j eune fille retrouva son vieux père et les champs qui l'avaient nourrie. Mais je crains , Messieurs, d'abuser trop long-temps de l'attention que vous avez bien voulu m'accorder. Je voulais combattre quelques injustes préjugés sur les enfants trou- vés ; pour le faire, je me suis appuyé sur les faits observés parmi nous. J'ignore si ailleurs ces faits se sont offerts sous un semblable aspect^ mais les conséquences que j'en ai tirées n'en sont pas moins rigoureuses, et si elles ne peuvent s'ap- pliquer qu'à L y o n , cette ville qui nous est si c h è r e , du moins elles seront une preuve de plus q u e , malgré ses malheurs, q u e , malgré ses égarements, sa population ce- pendant a fait des progrès incontestables , et qu'elle est de- venue à la fois plus heureuse et plus morale.