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370 le bord de ce marais était une immense quantité de voilures de toute espèce, déposées là depuis l'incendie du quartier de l'Arsenal. Plusieurs jeunes garçons étaient entrés dans ces voitures, et regardaient par les, portières tout ce qui se pas- sait au dehors : j'entrai aussi dans un très-beau fiacre, d'où je vis parfaitement la cavalerie lyonnaise passer et repasser le petit pont de la Gare. Au bout de quelques instants , voyant le feu des républicains s'éloigner un peu , je sortis du fia- cre et vins à la Demi-Lune auprès des pièces qui tiraient tou- jours. Les canonniers n'étaient pas plus de six, tous harassés de fatigue : je leur donnai un coup de main , c'est-à -dire, que je leur tendis les gargousses que je prenais dans les petits caissons d'avant-train. « Le feu ayant enfin cessé , je m'avançai avec quelques autres personnes sur la grande chaussée de Perrache , et je poussai jusqu'au dernier poste des Lyonnais. Cette chaussée était couverte de cadavres d'hommes et de chevaux. Je re- connus parmi les morts plusieurs individus , un des MM. Va- lesque , entr'aulres, et mon voisin Duon , beau frère de feu M. l'ancien médecin Figurey. Valesque et Duon servaient dans la cavalerie lyonnaise. Ce dernier venait déjà d'être dé- pouillé de ses vêtements, et son corps était étendu à la porte d'une écurie. Au même instant, arrivent un officier et deux volontaires de l'Ardèche , faits prisonniers par les Lyonnais, dans les broussailles de la presqu'île. On les conduit à la porte Perrache où était encore M. de Précy avec ses aides-de- camp. Tout le long de la chaussée, un des hommes de l'escorte ne cessa de pérorer l'officier. Camarade, lui disait-il, vois ma cocarde , et juge combien les brigands à qui vous obéissez, vous mettent dans l'erreur. On vous a fait égorger vos frères, oui, vos frères ; car enfin nous sommes aussi bien que vous les sol- dats du drapeau tricolore. « L'homme qui pérorait ainsi l'officier de volontaires, était un compagnon marbrier du quai de l'Hôpital , franc répu- blicain , niais ennemi juré du parli montagnard. Quant Ã