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252 quel autre qu'un valet de cour peut considérer sans frémir le flux de tant de crimes , de sottises , de calamités , émanés du ci-de- vant trône , sous les diverses dynasties qui l'ont occupé ? Peu- ple Français , tu t'es yu sur le point d'être submergé par ce tor- rent, et tu n'as pu te garantir de ces débordemens qu'en fai- sant disparaître sa source : que la terre engloutisse les traîtres qui entreprendraient de l'en faire ressortir ! Un peuple de sujets est content de son gouvernement lorsqu'il a un roi d'une conduite modérée ; il baise la main qui s'abstient de le frapper, sans faire attention qu'elle n'est pas moins éten- due Sur lui, qu'un roi modéré dans sa conduite a peu de succes- seurs qui lui ressemblent, et que celui-là même qui use le plus sagement des pouvoirs, du trône, veut, comme les autres , pou- voir en abuser. Pour toi, peuple souverain , qui connais la vé- rité, le prix, l'inviolabilité de la souveraineté dont tu as recouvré la jouissance, que t'importent des Titus (1) auquel succèdent des Domitien (2), et qui ne renoncent pas plus qu'eux à la faculté monstrueuse d'être , s'il leur plaît, des Çaligula (3) ? Loin de toi à jamais ce renversement d'ordre , appelé royauté , qui ferait dépendre ta destinée des caprices d'un homme , et travestirait en rébellion ta résistance à ses folies, à ses rapines , ou à ses fu- reurs ! Les maux qu'on reproche si précipitamment pu si mécham- ment à la liberté , sont l'ouvrage de ses ennemis , principalement (1) Depuis l'établissement de l'empire romain par l'usurpateur Octave, jus- qu'au règne de Titus qui ne fut que de deux ans , deux mois et vingt jours, les Romains n'ayant eu presque que des monstres pour empereurs, furent si en- chantés: de la bienfaisance de Titus , qu'ils l'appelèrent l'Amour et les Ddlices du genre Immain. Cependant les hommes qu'on forçait de s'entr'égorger dans le cir- que , pour le plaisir du prince et du public , appartenaient au genre humain , et Titus en sacrifia un grand nombre à cet infâme plaisir. (2) Domitien , frère et successeur de Titus , renouvela le règne des monstres précédens. Il donnait des ordres publics en commençant par ces mots : Voici ce qu'ordonne votre Seigneur et votre Dieu , et exigeait qu'on lui'donnât ce titre , soit en lui parlant, suit en. lui écrivant. (3). Çaligula, bête farouche, qui succéda à l'exécrable Tibère modèle de notre Louis XI, souhaitait que le peuple Romain n'ettt qu'une seule tété pour l'abattre cl''im seul coup. (Suétone: ) -