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97 dangereux de renverser de son piédestal «ne illustration usur- pée* il ne l'est pas moins de travailler à purifier une tombe souillée par les plus sanglans outrages, on ne peut le faire sans s'exposer à partager la réprobation de celui que l'on veut défen- dre, sans se voir calomnié et poursuivi avec un semblable achar- nement. Aussi n'est-ce pas sans hésitation que je viens au milieu de notre cité, encore toute palpitante des agitations de la guerre civile, encore brûlante des fureurs politiques, exhumer des souvenirs de ses premiers désastres un nom dont la malheureuse célébrité doit rappeler à nos pères les terreurs du passé et peut réveiller chez nous les haines du présent. Loin de moi la cou- pable pensée de souffler sur des tisons assoupis ; en écrivant cet article, je ne voudrais ni caresser ni blesser la susceptibilité des partis ; je n'ai qu'un seul désir, celui de présenter sous son vé- ritable jour un des caractères les plus remarquables de notre première révolution j caractère qui n'a jamais été justement ap- précié. Chalier... que de répugnances ce souvenir soulève après quarante années, et comment les vaincre ou du moins les apai- ser un instant pour me faire écouter. Je ne ferai pas l'apologie des cruelles nécessités de 93 ; je n'irai pas fouiller dans la pous- sière des tombeaux et chercher s'il reste encore quelques gouttes de sang pour en rougir ces pages ; comme un autre j'ai eu des larmes et de l'admiration* pour ces tristes jours, mais il me semble par trop injuste que l'on se plaise à en jeter tout l'odieux SUT la mémoire de certains hommes sans faire la part des circonstances, sans chercher à se rendre compte des sentimens qui les gui- daient. Avec une ame généreuse et élevée j un esprit juste mais entier dans son système , n n cœur doux et aimant et une imagi- nation exaltée, Chalier, constamment froissé dans ses convic- tions et par l'égoïsme et par les vices d'une société corrompue, fut entraîné à d'énergiques mais cruelles résolutions, à de san- guinaires frénésies. Par sa nature honnête et ses excellentes qua- lités, il eût été chéri et estimé de ses concitoyens, et dans le temps de crise où il vécut, son amour du bien public, sa cons- cience austère, la sévérité de ses principes, poussée quelquefois jusqu'à la cruauté, une indignation vertueuse mais exagérée jus- qu'à la folie, le conduisirent en moins de quatre années des bon-