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fils d'un ami intime de son mari, et qu'elle entendait qu'il fus-
sent traités comme tels ; elle-même donna l'exemple.
    Le plus jeune qui s'appelait Joachim, était surtout l'objet de
ses soins particuliers. Sa condescendance pour lui devint telle ,
que pendant une indisposition qui le retint quelques jours dans
sa chambre , elle lui fit dire qu'il pouvait venir au salon en né-
gligé ! Nous autres enfans , nous l'adorions. Nous allions lui por-:
ter dans sa chambre les plus belles fleurs de nos petits jardins
en entrant sans façon par la fenêtre , qu'il nous aidait à franchir
avec cette bonté gracieuse dont les enfans savent tant de gré !
Nous le trouvions tous les matins enveloppé dans une robe de
chambre de perkale brodée et doublée en soie. Je me souviens
encore du luxe de broderie de ses pantoufles , et surtout de la
petitesse remarquable de son pied. Un petit bonnet entouré d'a-
rabesque d'or et de perles était posé de côté sur une profusion
de cheveux noirs et bouclés , qui donnait à sa physionomie un
air tout particulier. Sa toilette était l'objet de soins minutieux. Il
avait un nécessaire d'une grande richesse , contenant une foule
d'uslenciles dont l'emploi nous était tout-à-fait inconnu , quelques
familiarisés que nous fussions avec toutes les recherches de la
propreté anglaise. Il s'habillait pour le déjeuner, s'enfermait
ensuite pour écrire, ou allait se promener avec ma grand'ma-
 man sous les grands arbres de la terrasse , puis à dîner il parais-
 sait dans une nouvelle toilette qu'il changeait encore à l'heure
 du thé.
   Un soir, après avoir écouté une longue réprimande au sujet
du meurtre d'un infâme chat qui nous avait mangé une nichée
d'oiseaux ( crime auquel il était prouvé que j'avais pris part). Joa-
chim sollicitait notre grâce auprès de ma grand'maman ; lorsque
notre vieux domestique entra tout effrayé en annonçant qu'un
détachement de garde nationale frappait à la porte du clos , et
demandait à visiter la maison. A ces mots , les deux officiers se
levèrent vivement. Joachim saisit un pistolet caché dans sa poi-
trine , et M. Macéroni tira un long poignard de sa poche. Ils
s'élançaient vers les fenêtres , lorsque ma grand'maman les ar-
rêta. — Faites faire le tour par la petite porte à ceux qui deman-
 dent à entrer, dit-elle au domestique, je vais les recevoir; et