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    La mode

    Les tailles courtes gagnent du terrain, la ceinture se hausse un peu plus chaque jour, et, après avoir protesté avec indignation contre cette prétention de nous ramener aux modes Empire et Restauration, en y ajoutant quelque réminiscence 1830, les femmes s'empressent d'y sacrifier un peu, ne serait-ce que « pour voir ». On n'ira pas jusqu'au bout de l'expérience et l'on se gardera de l'exagération dans ce qu'elle avait de ridicule; la vérité est qu'on assaisonnera de quelques réminiscences de ce temps notre joli costume actuel, pour lequel on garde la taille « à sa place ». L'illusion de la taille courte, à part quelques toilettes de style à sensation, est donnée par les ceintures, les corselets et ces charmantes vestes écourtées dont il est fait si grand usage. Beaucoup n'ont pas de manches et s'arrêtent devant et dans le dos, au-dessus de la ceinture; cela se fait avec toutes les étoffes possibles et dans les couleurs les plus franches, en velours rouge, pervenche, vert, dahlia ou nacarat. Le velours n'est pas seulement employé, mais la soie unie ou brochée et la dentelle. Quelques-unes sont tout en passementerie, en fourrure; d'autres garnies seulement de petits bords de loutre, de castor ou d'astrakan, cette garniture se trouvant rappelée par la bordure de la Jupe ou les ornements.

    La veste peut être aussi semblable à la robe, comme dans ce joli costume en cachemire de soie beige rose, dont voici la description en quelques mots : Jupe droite, fourreau devant et petite traîne, garnie d'un assez large marabout de même nuance, la veste très courte, en cachemire de soie beige, croise, fermant sur le côté, et laisse voir, dans toute sa hauteur, un corselet en peau de jaguar d'un effet très original. Un petit bord de cette étoffe forme comme un liseré autour de la veste; les hauts poignets sont en peau de jaguar, contrastant avec la manche bouffante beige rose.

    Une robe de réception mérite aussi qu'on s'y arrête : elle est en soie fantaisie, faite de rayures marabout pail'e, alternant avec une raie satinée mauve; le dos est orné d'un pli Watteau prenant sous une demi-pèlerine en dentelle formant épaulette et encadrant, devant, les côtés de l'empièce-. ment en soie paille, brodée de petites améthystes ; la ceinture haute, fixée à la taille sous le pli Watteau, est figurée par trois rubans de satin étroits mauve, serrés par une boucle de brillants, l'ornement le plus à la mode. La manche bouffante est en étoffe rayée et la manche plate en soie paille, brodée de perles comme l'empiècement; elle est cerclée, à la jonction des deux manches, par des rubans de satin mauve à boucles incrustées de brillants. Ces jolies boucles, dont quelques-uns ne sont pas des copies, mais ont figuré dans les toilettes de nos belles aïeules, se mettent avec le même succès sur les chapeaux, petites capotes ou chapeaux de genre de forme ronde. Un noeud bien enlevé, serré par une de ces boucles ou un bouquet de plumes retenu au pied par ce bijou élégant, ont tout de suite un cachet qui classe le chapeau.

    La mode, dans le domaine des chapeaux, est franchement oiiginale et gracieuse pourtant, malgré ses étrangetés; il y a des détails adorables et des recherches de couleurs exquises.

    La doublure claire, faisant opposition au dessus foncé, est de tous points charmante et seyante au possible; le vert foncé appelle tout naturellement le rose pâle ; le rouge brun, dans les tons nacarat, le dahlia sombre et les violets au coloris puissant s'associent bien au bleu très clair, un peu lavé; l'orange fait également un envers original au vert émeraude, au noir et au bleu foncé: Les chapeaux de velours sont nombreux, interprétés comme je viens de le dire, mais ils ne sont pas les seuls dans ce genre; le feutre, non moins élégant, est d'une grande fantaisie, nous offrant pareillement cet effet de deux couleurs, dessus foncé et dessous clair, et cela dans toutes les couleurs possibles. Le feutre fourrure est très joli, notamment.

    Notons, parmi les ornements qui ont une vogue assurée, les plumes d'abord, employées en panache; ou réunies en bouquet. Les grosses têtes de plumes sont indispensables sur les chapeaux ronds à grands bords; on y mêle lès oeils de paon, qui donnent de la légèreté et du piquant. La plume se met aussi en bordure, comme la fourrure, très goûté sur les chapeaux de style; en outre, quelques petites capotes se recouvrent entièrement déplumes. Signalons encore, dans les nouveautés, les nceude. en ruban de feutre très enlevés et piqués droit ; les noeuds en ruban de velours, ou velours à la pièce, sont pourtant la note dominante.

    Si l'on ne craignait d'employer un mot vulgaire, qui est le seul pourtant résumant exactement la mode, on dirait que celle-ci, tout en étant élégante, originale, suggestive, excentrique même par certains côtés, est du genre « cossu », les étoffes pour les costumes, robes et vêtements compris, et les ornements de chapeaux le prouvent. Le style n'a rien à perdre, au contraire, à ce goût pour les riches tissus et les ornements de prix.

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