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                               CHRONIQUE MUSICALE.                                   527
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  si distinguées au service de cette musique de seconde qualité. M Alboni chantant
  de l'Halévy et le chantant bien ! on ne le croira pas à Paris ; et je doute fort qu'elle
  s avise d'y aller en tirer vanité !
      Ce qui, malgré son succès étonnant et étonnamment soutenu, suffirait à prouver
  la vérité de notre opinion, c'est que tous les passages qui ont fait frissonner de plai-
  sir l'auditoire, étaient changés ou ajoutés, tirés de sa manière à elle, et non du texte
  français. Le parterre abusé a cru la cantatrice descendue jusqu'à lui ; mais c'est lui-
  même qui s'élevait à son insçu, et qui, en réalité, applaudissait de l'Italien! Ah,
  s'il pouvait recevoir plus souvent de professeurs semblables un pareil enseignement...
      Il est un reproche, un seul, sous lequel se retrauchent les critiques quand même.
  " M Ue Alboni manque de chaleur; elle ne mêle pas- aux situations du drame une
 Pantomime assez vivante. Sa voix même, toujours contenue et mesurée, n'atteint
  presque jamais cet élan passionné qui dénote un sentiment lyrique réel et profond. »
      Ce reproche, que sa tenue réservée dans les concerts avait fait porter et accepter
  d'avance, a reçu, depuis, trop de démentis pour suhsister encore chez les connais-
 seurs d'un certain ordre. S'il est vrai que, rivée par sa conformation au style majes-
 tueux, elle présente, dans les trois rôles où nous l'avons vue, le perpétuel antipode
  de leur créatrice, si justement nommée — Cl os— par les calembour isies parisiens,
  le drame que je sache, n'a pas eu à souffrir de ce changement. Sa belle tète si ex-
 pressive suit avec une finesse, une mobilité incroyables, les phases diverses de l'ac-
 tion, et, à coup sûr, ce ne sont pas ceux qui l'auront étudiée à la lorgnette qui la
Jugeront froide ou insensible.
     Quant au chant, rappelons-nous que Dupiez, — en 1837, à Paris, — fut critiqué
 par plusieurs feuilletonistes, pour son défaut de chaleur dans Yanalhème de la Juive •'
 Il est un public qui veut absolument que l'acteur qui a chanté quand il devait être
 «mu, crie lorsqu'il a à peindre la passion. C'est la seule nuance qu'ils sentent : Est-il
 Monnant qu'ils la conseillent? — A chacun son métier. Chantez toujours, croyez-moi.
 Y
   ous qui pouvez chanter, et laissez-les crier !
     N'exagérons pas, toutefois, dans le sens du panégyrique. Sans être froide par im_
Puissance, je soupçonnerais volontiers M lle Alboni d'être quelquefois tiède par calcul
 Elle appartient, je le crois, à cette classe de chanteurs dont Rubini est le prototype
e
  t que, sans les taxer d'avarice, on peut assez justement désigner sous le nom d't'co.
"ornes. Si j'avais ici à faire le cotapte de M lle Alboni, l'addition de ses économies
> figurerait pour une assez grosse part ; car il en est jusqu'à trois espèces dont je
  "
me ferais fort de la convaincre :
     i° Economie de ions. Celle-ci est des plus louables. M lle Alboni a le sol pur et
franc ; le la douteux. En s'efforçant de le soutenir quand la partition l'exige, elle y
réussirait sans doute : mais dans un an ou deux le sol, le fa, seraient entames. Cet
'dmirable organe, — qui semble créé et mis au monde pour chanter, absolu-
•"«nt comme l'oiseau gazouille, comme l'enfant gambade — deviendrait trem-
bloté, maigre, vaccillant, trahirait l'effort. L'effort ! à Dieu ne plaise ! Allez, conti-
nuez, sans façon à nous escamoter le la ; de telles économies profitent à tout le monde-
     a° Economie sur les dépenses gui ne paraissent pas. Voilà où commence à percer
"artifice. Dès qu'il faat/aire sa partie, notre cantatrice se repose. Trop souvent,