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ACHILLE ET CHRISTOPHLE DE GAMON 25 monographies locales, riches de détails authentiques, comme un guide pré- cieux dans la recherche dupasse. Achille Gamon est, à ce point de vue, un personnage digne d'attention, car aucun ne représente mieux le bourgeois instruit, sage, honnête et laborieux du xvie siècle. Quant à Christophle, son œuvre est assez considérable pour mériter une véritable résurrection auprès de cette fraction du monde lettré qui s'occupe de nos vieux écrivains français, Il nous semble qu'on est généralement injuste envers ces premiers pionniersde notre langue. Au lieu déjuger leurs écrits, comme le voudraient la raison et Téquité, en tenant compte des temps et des circonstances, on les rend beaucoup trop justiciables de nos goûts modernes,d'ailleurs assez varia- bles et sujets à discussion. Cette sévérité d'appréciation se comprenait du temps de Boileau. L'auteur des Satires représentait la réaction de la grammaire et de l'ordre littéraire contre les licences d'une langue pleine d'inexpérience et animée de toutes les fougues de la jeunesse, et la force des choses l'obligeait à frapper fort plutôt qu elle ne le disposait à juger équita- blement. Nous sommes, mieux que Boileau, en position déjuger avec impar- tialité nos vieux écrivains, et nous serions ingrats de ne pas reconnaître les services qu'ils ont rendus a la langue française, cet admirable véhicule de l'esprit français, et la part qu'ils ont ainsi prise à ses conquêtes dans le monde. Les poètes ont des titres spéciaux à notre gratitude. La versifica- tion est l'exercice le plus utile à l'écrivain. C'est une sorte de haute école où l'on apprend à assouplir la langue, à concentrer la pensée, à la rendre sail- lante, à lui donner des ailes. Le vers oblige à trouver l'expression juste, la tournure et l'image qui mettent l'idée en relief et la rendent saisissable même pour les esprits obtus. D'une pensée vague il fait jaillir une lumière, comme le ciseleur fait d'un métal informe sortir un bijou artistique. C'est en s'essayant a faire des vers qu'on apprend le mieux à écrire de la bonne prose, c'est-à -dire à parler ce langage concis, clair, vivant, imagé qui caractérise les véritables écrivains. Le personnage fort peu connu, qui forme l'objet de cette notice, n'est pas une des étoiles de la Pléiade. Il est venu après elle dans cette période indé- cise qui s'étend de Ronsard à Malherbe. Sa célébrité paraît s'être bornée à un petit cercle d'admirateurs provinciaux. On verra toutefois qu'il n'est pas dénué de valeur, et qu'il mérite, sinon un fauteuil, au moins un tabouret dans l'histoire de notre littérature. Celle-ci a été jusqu'à présent