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700 LA 111ÎVUE LYONNAISE Qui est plus silencieux que Timée devant des indifférents ? et plus disert, je dirai même pins éloquent que lui, lorsqu'il peut épancher librement son âme ? Timide parce qu'il est doux, hardi parce qu'il est fort, il offre le singulier spectacle de deux caractères opposés. La bataille qu'il gagnera l'effraye. La lutte lui fait horreur; et pourtant quelle énergie, quelle ardeur, quelle vail- lance il y va déployer ! Les arguments se pressent sur ses lèvres. Son front se hausse, ses narines se dilatent ; ses yeux lancent des flammes ; son geste, toujours harmonieux, accompagne les mou- vements de sa pensée, les mouvements de sa parole. Qui résisterait à tant de force et à tant de grâce? Ses adversaires, heureux d'être vaincus, battent des mains. Et lui, ne prendra-t-il pas orgueil de sa victoire? Regardez-le : l'air confus et désolé, il n'a qu'une crainte, d'avoir fait de la peine ; qu'un souci, d'obtenir son pardon, et il faut le consoler. STUDION est-il un savant? Je distingue. Studion a bien acquis une certaine science ; mais de science profonde, large et haute, de bonne et vraie science, il n'en a point. Studion lit jour et nuit, Studion travaille nuit et jour, mais tout ce qui entre dans cette cervelle s'y gâte, comme un liquide dans une mauvaise futaille. Intelligence trouble, jugement frelaté, mémoire malencontreuse, voilà Studion. Ajoutez-y une langue très lourde, impuissante à dire les choses heureusement. Néanmoins, Studion cache à peine qu'il se croit un parangon d'éloquence. -À « L'éloquence, répondait l'orateur antique, c'est l'action, encore l'action, toujours l'action ! » L'action ! qu'est-ce à dire ? Entendait il le geste? l'organe? l'attitude? la prestance? le débit? le mouvement des idées ? la vivacité des images ? la véhé-