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 170                  LA REVUE LYONNAISE

 adscribimus, mais il a pour principe, principe qu'il impose à ses
 lecteurs, que « trois témoins idoines suffisent pour toute cause ».
    Quelle que soit la supériorité de son intelligence, un homme est
 toujours, par quelque côté, de son temps. Raymond est du sien
 par sa crédulité. Pas de prodige qu'il n'accepte sans examen. Il
 consignera comme très importants les détails les plus puérils. Ainsi
 dans une des apparitions de saint André— et elles sont nombreuses
 — il se complaît à décrire minutieusement l'habillement des « es-
 prits ». Saint André était revêtu d'une vieille tunique déchirée aux
épaules. Sur l'épaule gauche un pan était cousu; rien sur la
droite, ses souliers étaient de vil prix (viliter)... le bienheureux
Pierre était couvert d'une chemise grossière et longue jusqu'aux
talons. » Ailleurs, Adhémar, l'évêque du Puy, apparaît etdit : « Je
suis dans un chœur avec le bienheureux Nicolas, mais comme j'ai
 douté de la lance du Seigneur, moi qui aurais dû surtout le croire,
j'ai été conduit en enfer; là mes cheveux, sur la partie droite de la
tète, et la moitié de ma barbe ont été brûlés, et quoique je ne sois pas
dans la peine, je ne pourrai voir clairement Dieu que lorsque mes
cheveux et ma barbe auront crû comme avant. » Mais sa crédulité
a cependant des bornes, et elle refuse déconsidérer, sans preuves,
comme des reliques, des ossements anonymes. « Et moi, Raymond,
devant tous, je lui dis fortement : « Pouvons-nous honorer des os-
sements inconnus ! » Et dans l'épreuve du feu que subit P. Barthé-
lémy au sujet de la sainte lance, il ne dissimule pas les blessures
légères que reçut ce dernier, non plus que la mort qui suivit de près
ces blessures.
   Ne sont-ce pas là des preuves de bonne foi et de courage qu'il
faut reconnaître et apprécier?..
   Sa grande préoccupation c'est d'établir l'action divine, s'exer-
çant d'une façon incessante à l'encoutre de l'armée croisée. Les
événements humains ne sont pour lui que l'accomplissement di-
rect des projets de Dieu ; et les hommes, des facteurs de peu d'im-
portance. H est continuellement attentif à rapporter à Dieu irrité
ou miséricordieux les fâcheux échecs, ou les heureux succès de
l'armée chrétienne. Si les croisés sont victorieux, c'est qu'ils sont
soutenus par une 'armée invisible ; chaque soldat étant doublé
d'un esprit céleste qui combat avec lui. « Miracle insigne, deux