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378 TROIS MOIS A VENISE
l'Italie pour la beauté de la salle, qui est partout ornée de peintures
très fines. Il y a aussi, à Venise, de charmants petits théâtres de
sociétés, au nombre de cinq; des salles de bals particuliers où,
pour être admis, il faut être sociétaire et payer une cotisation
annuelle.
Vous n'ignorez pas que la lagune entoure la ville de Ve-
nise. Quand la mer est basse, on aperçoit par-ci par-la des
îlots de boue ; et, alors, il ne faut pas s'aventurer en barque indif-
féremment. Des piliers de bois (pâli) servent à indiquer les en-
droits les plus profonds, où l'eau permet de circuler facilement ; car,
sans cette précaution, on est obligé de tirer sa gondole à force de
bras et avec les rames pour ne pas être à sec. Pour aller sur la
lagune, on prend une gondole ou une petite barque dite sandolo. La
gondole est étroite, longue; au milieu, se trouve une vraie capote
de voiture sous laquelle vous prenez place. Les gondoliers se
tiennent debout, sur les pointes de la gondole avec leurs rames.
'Leur habileté est merveilleuse. Il faut les voir à l'œuvre.
Il y a aussi, dans le port de Venise, de grands bâtiments Ã
vapeur pour Trieste, Messine, l'Egypte, etc.
Vous avez entendu parler du Lido. C'est une île voisine de
Venise, où se rend l'été toute la haute société. Il y a un important
établissement pour les bains de mer. On aperçoit, à l'horizon, des
centaines de bateaux pour la pêche; ils ont des voiles jaunes,
rouges, bleues, ce qui est une spécialité de Venise. Sur ces voiles,
sont peints des saints, d'antiques emblèmes.
Les sérénades de Venise méritent quelques lignes. Il y a, tous
les soirs, pendant la belle saison, des sociétés d'artistes qui, en
gondole, violons et guitares en main, voire un petit harmonium,
passent près du célèbre pont des Soupirs et se rendent en chan-
tant à celui du Rialto. Leur gondole est entourée de lanternes
vénitiennes ; leurs chansons mélodieuses vous saisissent. Ces pro-
menades sur l'eau sont tout ce qu'il y a de plus artistique. Un soir,
accompagné par plusieurs amis, j'ai pris une gondole, et me
voilà suivant la sérénade, heureux d'entendre des airs vénitiens.
Je ne puis m'empêcher de vous donner un couplet, eu italien,
d'une ravissante chansonnette populaire vénitienne, qui date de
loin et qui est intitulée ; La Gondollelta (La Gondole).