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                                   BIBLIOGRAPHIE                                          207

   M. Pessonneaux excelle, on le voit, à prendre tous les tons et à s'adapter à
tous les sujets. Félicitons-le aussi, on terminant, de l'heureuse idée qu'il a eue
d'ajouter au charme de ses vers celui des illustrations fort bien exécutées dont
il a enrichi son volume.                                  GH. LAVENIR.



      MONSIEUR ET MADAME BEWËR, par PAUL LINDAU, avec une préface de
        M. JULES   CLMIÎSTIE et une lettre à l'auteur, par EMILE AUGIER. — Paris.
        Fîinriehsen et (Jie, éditeurs, 40, rue des Saints-Pères, 1SS4. — Un vol. in-18.
        Prix : 3 fr. 50.

   11 est difficile de parler du livre nouveau du romancier berlinois Paul Lindau
dont la maison Hinrichsen publie une traduction, alors que tout a été dit et fort
bien dit par M. Jules Claretie, dans la remarquable préface qu'il a mise en tôle
du volume. L'on se trouve en présence d'une œuvre que ne désavoueraient pas,
pour sa tournure fine, pour son analyse admirablement conduite, pour son cachet
de parisianisme, les meilleurs de nos écrivains, lit cependant l'auteur n'en est
pas moins, suivant l'expression du critique français, « Allemand de toutes les fibres
de son être et de son talent ». Mais il est en même temps l'admirateur passionné
de notre littérature, le commentateur érudit et aimable de Molière. Aussi c'est de
grand cœur que je m'associe aux témoignages de sympathie que lui adresse
M. Claretie qui a le plaisir de le compter au nombre de ses amis.
    L'intrigue de son roman est des plus simples. Un Allemand, dans toute la
vigueur de l'âge, après avoir fait à Sumatra une fortune considérable, rencontre
dans un café-concert à son retour à Berlin, une petite cabotine qui chante à ravir
la chansonnette en dialecte viennois, et dont i! devient éperdûment amoureux.
 Celle-ci, après avoir commencé par s'étonner de cette passion à laquelle elle
n'est point accoutumée, ne tarde pas à y répondre, non, comme on pourrait
le croire, en devenant, selon l'usage, sa maîtresse, mais en acceptant de l'épouser.
Ce qui devait arriver ne tarde pas à se produire. La nostalgie de la boue est trop
forte chez Katlii. Elle retourne à ses habitudes premières et le pauvre Klaus,
désolé, le cœur saignant, se rembarque pour Sumatra. 11 serait malaisé de nom-
brer les pages charmantes à signaler dans ce volume. M. Claretie a indiqué les
plus saillantes, il en est d'autres où en même temps que ceux de la pensée des
acteurs en scène de ce petit drame intime les jeux de leurs physionomies se r e -
flètent comme dans un miroir. Qu'on me permette de citer ici un fragment de
scène entre Klaus et Kathi dans l'hôtel où il l'a installée, avec une dame de
compagnie, s'il vous plaît, dès le début de leur connaissance :
   « 11 la contempla un moment d'un r e g a r l plein d'amour : elle était vraiment
ravissante. —- Kathi, ajouta-t-il en changeant de voix, as-tu pensé à te procurer
tes papiers ? Il ne faut pas perdre du temps inutilement.
   — Quels papiers? demanda-t-elle du ton le plus sincère.
   — Mais les papiers dont nous avons besoin pour le mariage; ton extrait de
baptême, et le consentement de ton père suffiront, je pense.
   — Ah ! oui, répondit Kathi avec indifférence.
   Les écailles venaient de tomber de ses yeux.
   Tout ce qui, depuis la veille, lui paraissait étrange, énigmatique, s'éclaircissait
tout à coup. Elle sentit une vive émotion l'envahir, mais elle la maîtrisa aussitôt.
Elle se disait instinctivement qu'elle ne devait trahir par aucun geste la surprise