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560                  LA REVUE LYONNAISE
ses morsures. Et puis, elle nous a coûté si cher, cette vieille terre
que le père Bugeaud appelait : « Une fâcheuse conquête » et le duc
de Broglie : « Une loge à l'Opéra ». Nous y avons versé tant de
sang, enfoui tant d'or, récolté tant de gloire, tant des nôtres y dor-
ment leur dernier sommeil qu'elle est devenue partie intégrante et
sacrée du patrimoine commun et que le drapeau tricolore emporté
loin d'elle y reviendrait tout seul. Gardons-la, faisons cette senti-
mentale dépense, mais au nom de notre avenir sombre, de notre
vie nationale menacée, imposons-nous des bornes. La nature elle-
même a eu soin de nous les indiquer. Prenons l'Atlas pour fron-
tière, retranchons-nous derrière de façon à défier les attaques et
ne jetons pas des regards de convoitise bête sur les Touaregs, les
Nigritiens, les Congotiens, leurs sables, leurs palmiers et leurs
chameaux, toutcela nevaut pas une vie française. Et decetteAlgé-
 rie réduite aux territoires les plus riches et les plus défendables,
restreinte aux limites d'une transaction acceptable entre le senti-
ment et la raison, le cœur et la dot, il serait possible encore, il se-
rait facilede tirer un parti immense. Les indigènes sont sales, pa-
resseux, faux, menteurs, voleurs, sans mœurs, prompts à l'as-
 sassinat, mais on ne peut leur refuser trois^ qualités :• la sobriété,
 te respect de la discipline, le mépris de la mort, les trois qualités
 maîtresses du soldat. La conclusion s'impose. Ouvrons-leur large-
 ment les rangs de notre armée. Nous en avons douze mille, ayons en
 quarante mille. Ils ne demandent pas mieux, les bureaux de re-
 crutement ne reçoivent pas chaque année le quart de ceux qui se
 présentent. En temps de guerre, leur bravoure aveugle nous four-
 nira un appoint formidable, comme on l'a vu en Crimée, en Italie
 et pendant la débâcle de 1870 où un de leurs bataillons a plus d'une
 fois tenu tête à un régiment prussien. En temps de paix, ils iront
 surveiller le Sénégal, la Cochinchine, le Tonkin, puisque Tonkin
 il y a, les autres colonies lointaines, et trouveront surtout leur
 emploi en France comme gardiens de l'ordre public. Qu'il y en ait
 25,000 à Paris, 10.000 à Lyon et dans les bassins houillers de la
  Loire. Avec ces gens disciplinés, aveuglement obéissants, pour qui
  la consigne est sacrée, qui ne lèvent jamais la crosse en l'air et
  qu'on aurait soin, du reste, d'éloigner au moindre symptôme de ci-
  vilisation, avec des officiers d'élite qu'on habituerait à regarder ce