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                                     FÉLIBRIGE                                     499

Dins li carriero estrecho e torto,               dans les rues étroites, tortueuses,
                                                 tout le monde, empressé,est dehors:
Apreissa toûti soun pèr orto :                   filles, jouvenceaux, moines, soldats.
Fiho, jouvènt, mounge, soudard.

 Es un carnava de Veniso :                         C'est un carnaval de Venise : les
                                                 hommes en manches de chemise
 Lis orne en mancho de camiso                    heurtent cent fois les grandes dames,
 Tuerton li grand damo cent cop,                 les pécheurs crient leur poisson et
 Lipescadou cridon sa pesco,                     les vendeurs d'eau fraiche appellent
                                                 et font tinter leurs gobelets.
• E li vendèire d'aigo fresco
 Quilon e fan dinda si got.

De l'oumbro de tduti li caire                       De l'ombre de tous les carrefours,
                                                 il sort des troupes de musiciens. O
Sort de mouloun de musicaire.
                                                 gais concerts, jamais finis! Écoutez
O gai counceit jamai flni !                      les mandolines et les guitares : la
Ausès mandoulino e guitarro :                    fenêtre s'ouvre... Tout à l'heure une
                                                 amoureuse va venir.
La fenèstro seduerb... toutaro
Uno amourouso vai veni.

 Entendieû pas la cridadisso,                      Je n'entendais pas la clameur, et.
                                                 dans la foule onduieuse, je nevoyais
 E, dins la foulo mouvedisso,
                                                 que la belle enfant; parfois elle me
 Noun vesieù que la bello enfant ;               semblait perdue ou bien jouant â
 De-fes me semblavo perdudo,                     cache-cache dans la va^ue du peuple
                                                 étouffant.
 O que jougavo is escoundudo
 Dins l'erso ddu pople estoufant.

 Ansin jusqu'au Pont dou Rialto                    Ainsi, jusqu'au Pont du Rialto nous
                                                 marchâmes... Elle s'arrête; j'allais
 Gaminerian... Elo faialto;
                                                 latteindre ! Et voilà que la petite
 Anave la rejougne ! Es que                      fée hèle un rameur, et sans amou-
 La fadeto sono un remaire,                      reux, sans sa mère, vive, elle s'em-
                                                 barque, et je reste coi!
 E, sens galant e sènso maire,
 Lèsto s'embarco, e reste quet !

Soutu la remo l'oundo gisclo ;                     Sous la rame l'onde jaillit ; l'ombre
                                                 croit : aux pointes des îles déjà s'al-
L'oumbro crèis ; i pouncho dis isclo
                                                 lument les falots; les palais et les
Déjà s'atubon li fauau;                          campaniles, les portiques, d'un
Li palais e li campanile,                        calme reflet se mirent dans le Grand-
                                                 Canal.
Li pourtau, d'un rebat tranquile
Se miron dins lou grand Canau.

Coume uno negro dindouleto                         Ainsi qu'une hirondelle noire fuit
Fuso la gandolo... — Souleto,                    la gondole... — Seule, l'enfant s'en
                                                 va, ô soir amer! et hors de la brune
L'enfant s'envai, o vèspre amar !                gondole, sa robe comme un rayon de
Foro de la gandolo bruno                         lune, blanche, glisse sur la mer.
                                                    Venise, 1873.
Sa raubo coume un rai de luno,                                               T. A.
Blanco, resquiho sus la mar.
    Veniso .
                 TEODOR     AUBANEL