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464                 LA REVUE LYONNAISE
clôtures, de percer les murailles et de crocheter les portes. Il faut
remarquer à ce propos que les chiens de garde, quels qu'ils soient,
ne mordent jamais l'Arabe nu et lui épargnent même leurs aboie-
ments, aussi l'artiste digne de ce nom n'opère-t-il qu' « in natura-
libus». Quand le vol est consommé, quand les bestiaux ont disparu
du pacage ou de l'écurie, les grains du silos, et que le volé s'est
livré pendant quelques jours à des recherches vaines, voici généra-
lement ce qui se passe. Un indigène étranger au douar se présente,
déclare que le hasard lui a appris le lieu du recel et offre de le
faire connaître, moyennant rémunération, bien entendu. L'offre
acceptée, la restitution a lieu dans la plupart des cas. C'est ce
qu'on appelle « Bechara », ce qui signifie ou à peu près : Agence
de renseignements. Quand la justice française met la main sur des
fonctionnaires de cette agence-là, elle a pour habitude de les con-
damner impitoyablement, soit comme escrocs, soit comme com-
plices des voleurs, et, n'a pas tort; on m'a pourtant assuré quecette
profession originale était parfois exercée par des « lazzaroni»,
 des « buveurs de soleil », sans accointance aucune avec les cou-
pables. Quand un de ces derniers comparait devant un tribunal,
il ne manque pas de prétendre qu'il a des relations de vieille date
avec la femme du plaignant, qu'il a encouru les peines de l'adul-
tère,mais non celles du vol. Si le président lui demande des preuves,
et même spontanément, il tire de dessous son burnous une longue
mèche de cheveux, évidemment cueillie sur une tête féminine, et
qui a dû servir à pas mal d'autres dans des cas analogues. Cette
 démonstration lui paraît sans réplique. N'est-ce pas de là que vient
 l'expression française : « Il y a mèche, il n'y a pas mèche. » Je
livre cette hypothèse hasardée, je le reconnais, aux méditations
 des étymologistes.
   Les coups de trique, en sabir, matraque, les coups de couteau,
les coups de pistolet, les coups de fusil, se distribuent chez eux
avec une prodigalité sauvage. Le sang n'a pas de prix, ils le ver-
sent comme de l'eau, pour une injure, un mouton ou une motte de
terre contestés, un regard jeté du côté des femmes. Ces dernières
fournissent le gros contingent des victimes. Epouses, filles, sœurs,
mères, grand'mères : toutes y passent. Un Arabe, ancien officier à
notre service, très au courant de notre langue, aussi francisé