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            DE LA R E S P O N S A B I L I T É L I T T É R A I R E   259
   Sans vouloir discuter les détails du système du poète Victor
Hugo, devenu socialiste, il est permis d'affirmer qu'à l'aide de ces
théories prétendues humanitaires, on ne connaît pas de crime qui
ne puisse être excusé. Il n'est pas moins vrai qu'autrefois comme
aujourd'hui, dans les familles, les enfants ont pu être mal élevés
malgré les leçons de l'école obligatoire ou non obligatoire. Les pen-
chants vicieux ont pu se développer sans obstacle ou malgré toute
sollicitude. La maie suada famés, dans les monarchies modernes
ou anciennes, comme dans toutes les républiques, a aussi servi jus-
qu'à entraîner au crime; mais, malgré tout, les jurés de nos cours
d'assises, comme les anciens tribunaux criminels, envoient en lieu
sûr les individus qui, par leur faute ou par la faute de la société,
ont commis un crime, en attendant que'la théorie passe à l'état de
doctrine incontestée.
   Il y a donc, aux yeux du plus grand nombre, des responsabi-
lités individuelles. Toutefois, de nos jours, on tend à faire dominer
la théorie de la responsabilité de la société sur la responsabilité
personnelle. L'école démocratique que je signalais à l'instant,
compte parmi ses adeptes les théoriciens les plus avancés et les
plus hardis libres- penseurs ; ce sont ceux-là qui repoussent le
plus obstinément la responsabilité individuelle, au préjudice delà
responsabilité sociale.
   Mais une vérité s'impose immédiatement. Si le criminel ou
l'homme corrompu ne sont pas responsables de leurs actes, pour
être logique, en rejetant la faute sur la société, ne faut-il pas
reconnaître que cette société n'est pas formée, quant à ses mœurs
et quant à ses idées les plus hardies, sans la participation de toutes
les productions de la littérature et de ia science sociale en vogue ?
Les auteurs de tant d'écrits n'agissent pas parce que la société les
a négligés; mais il faut toujours en revenir à leur responsabilité
particulière, et la question se trouve enserrée dans un cercle
vicieux.
    Néanmoins, la question sociale est réglée par des lois providen-
tielles que l'expérience des penseurs sérieux force à reconnaître.