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                     DERNIERE A V E N T U R E                     151
    — Banquo ! répondit Lulleval.
    Je le regardai : il était pâle, mais sa voix ne trahissait au«une
 émotion.
    Tout le monde se tut, le coup était intéressant. Les femmes vin-
 rent autour de la table en penchant leurs têtes curieuses. Le ban-
 quier donnait lentement les cartes.
    — Neuf ! dit Lulleval en abattant son jeu.
   Il se leva.
    — Messieurs, continua-t-il, je vous remercie et je vous demande
pardon de faire « charlemagne ». L'argent que je vous ai gagné
est destiné à une bonne action que, comme je vous l'ai expliqué, je
n'avais plus le moyen de faire moi-même.
   Il ramassa l'or et les billets qui étaient amoncelés devant lui et
rejoignit Laura.
   — Mademoiselle, lui dit-il, de façon à n'être entendu que d'elle
et de moi, vous m'avez autorisé à tout entreprendre pour vous
soustraire au sort qui vous attend si vous restez auprès de votre
sœur.. Voilà vingt mille francs que je vous prie d'accepter. Cette
somme me paraît plus que suffisante pour vous permettre d'at-
tendre, de choisir une position tranquille et honorable.
   — Très bien ! Guy, je te reconnais là, lui murmurai-je à
l'oreille en lui serrant énergiquement la main.
   — Monsieur, balbutiait Laura éperdue, je ne sais si je puis, si je
dois profiter de vos bontés.
   — Pourquoi non ? Mademoiselle ; ces vingt mille francs sont à
vous, rien qu'à vous. Si je n'avais pas eu l'espoir de vous être
agréable je n'aurais pas joué. Prenez-les, vous dis-je, et faites-moi
l'honneur de croire que je ne vous demande nullement de vous
considérer comme mon obligée. Demain je serai loin et vous ne me
reverrez plus.
   — Mais, Monsieur, où irais-je? quand et comment quitter ma
sœur? Que lui dire?
   — N'est-ce que cela qui vous embarrasse, Mademoiselle? Voulez-
vous vous en rapporter à moi ? Voulez-vous me laisser faire et me
promettre seulement de ne pas me contredire ?
   — Oh ! oui, Monsieur, c'est cela, agissez comme vous l'enten-
drez, je me remets entre vos mains.