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DERNIERE AVENTURE 149 la naïveté des actionnaires,cette mine tant exploitée mais décidément inépuisable, personnage véreux, en un mot, dont il faut bien se résoudre à subir la poignée de main quand on va chez les femmes légères. Cet individu, après avoir salué Lucia Martelli, alla s'as- seoir à côté de Laura avec un air qui ne laissait aucun doute sur le rôle qu'il jouait ou tout au moins qu'il aspirait à jouer. Lulleval, qui lui aussi s'était fait mettre au courant de l'histoire de Laura, avait suivi ce manège des yeux et fronçait le sourcil. — Est-ce là , ne puis-je m'empêcher de dire à Lucia, ce que Zoé entend lorsqu'elle affirme vouloir se charger du bonheur de sa sœur ? La pauvre fille serait-elle déjà devenue la proie de ce Labourette ? — On peut toutvous dire, à vous, n'est-ce pas? car vous n'avez aucune idée de vous mettre sur les rangs. Zoé, donc, destine sa sœur à Labourette, ou Labourette à sa sœur, comme vous voudrez. Zoé est femme pratique et Laura peut suivre aveuglément ses con- seils . Il paraît que Labourette fait meubler avec la plus grande recherche un charmant petit hôtel non loin d'ici, qu'on y pendra la crémaillère dans une quinzaine de jours, que Zoé y viendra avec sa sœur, mais rentrera seule. Comprenez-vous ? — Quoi ! Zoé se prêterait à ce hideux marché ? — Cela vous étonne ? c'est pourtant bien simple, fit Lucia d'un ton ou perçait son dégoût pour cette fange, toute fille perdue qu'elle était. Les derniers invités attendus arrivaient. Il y eut un mouvement général dans le salon, Labourette quitta Laura. Lulleval, qui sem- blait épier ce moment, s'avança d'un pas décidé vers la jeune fille à qui il n'avait point encore adressé la parole et se mit à lui parler. La figure de Laura témoigna bientôt de la gêne, de la sur- prise, et enfin une vive émotion. Personne ne pouvait entendre ce que disait Guy, mais il semblait encourager, insister, supplier. Enfin Laura eut un geste d'assentiment et retomba toute troublée sur sa chaise. Cependant les hommes, y compris Labourette, entouraient une table qu'on venait de disposer pour le jeu et s'installaient, mêlant les cartes, étalant devant eux l'or et les billets. Guy s'approcha.