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                                 LA


       NOBLESSE BOURGEOISE


   On ne saurait croire combien, malgré les découvertes merveil-
leuses qu'elle a accomplies, l'intelligence humaine est, au fond,
indigente et combien il faut peu d'idées pour alimenter une société
qui se dit instruite et civilisée. Lorsqu'on pèse son bagage intel-
lectuel, — j'entends par là non les doctrines scientifiques qui sont
le privilège du petit nombre, mais les idées généralement reçues,
celles qui se répètent chaque jour et qui ont cours dans la masse,
— et quand on sépare le vrai du faux, les préjugés populaires des
axiomes dont la certitude est démontrée par la logique implacable
de l'expérience, on est effrayé du peu dont se contente l'esprit
vulgaire et de la tendance presque invincible qui lui fait pré-
férer une opinion toute faite à celle qui exige quelque étude ou
quelque réflexion, le mensonge bruyamment accrédité à la vérité
silencieuse ou méconnue. Qu'on ne s'y trompe pas cependant. Ce
goût universel du poncif est moins qu'on pense défavorable aux
lettres : il n'accroît peut-être] pas l'autorité ou la renommée des
écrivains, mais il agrandit le champ de leurs investigations, car les
Idées générales, dont l'usage est si commun, si familier à l'esprit
français, demandent à être renouvelées sans cesse par un sérieux
       AOÛT 1883. — T. VI.                                   8