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108 LA R E V U E LYONNAISE style sans âme et sans talent ; ensuite, que pour plaire au profanum vulgus, il faut plus que jamais fouiller au profond des bourbiers, et que, heureusement pour lui, M. d'Hericault ne possède en aucune façon les agréments qui distinguent l'animal qui cherche les truffes, et en même temps grand nombre de romanciers contemporains. On nous dispensera de donner des exemples ; l'haleine nous man- querait à épuiser la liste- Style et talent dramatique, nous retrouvons ces deux qualite's dans Rose de Noël, le roman nouveau de M. d'Hericault. L'auteur raconte bien, il peint de même, sobrement, avec mesure. Il y a presque au commencement du volume, la description d'une salle de ferme le soir, qui tient dans une demi page et qui compose un tableau plus complet que ne le ferait une tartine naturaliste de quinze pages : à l'école de Médan, l'on ne saurait, peindre à moins. Quant à l'action elle-même, l'espace nous manque 'pour l'analyser. L'intérêt s'3r soutient jusqu'au bout. Et cependant elle nous paraît, à certains endroits, un peu embarrassée. Nous aurions de la peine à préciser exactement notre observa- lion, à montrer le point précis où nous désirerions un peu plus de clarté : le desi- deratum que nous formulons, c'est un je ne sais quoi que l'on ressent, sans peut- être parvenir à le saisir. Les caractères sont dessinés avec art : Louis Belenclos, ce paysan devenu un grand lanceur d'affaires, hommes sans mceurs, absolument dépourvu de conscience, est un type tracé de main de maître. Florine est encore une des meilleures créa- tions du romancier. Les personnages secondaires ne sont point négligés non plus : Robertine, un peu coquette, est charmante, le vieux père Belenclos est un noble caractère. Rose de Noël est donc, à tous égards, un bon roman, et il figurera avec hon- neur à la suite déjà longue des publications de M. d'Hericault. Cri. LAVENIR. LES CHANTS DU CÉLIBAT, poésies, par PAUL VIGNET, Paris, Ghio, Palais-Rnyal, 188î. Prix, 3 francs. En ouvrant ce volume nous sommes tombé sur une pièce, Dimanche de mars, qui débute par cette observation : L'aiguille pique un V aux cadrans pneumatiques, Et les boutiquiers ont boulonné leurs boutiques. Voilà donc un poste et un naturaliste. Daux choses qu'il s'agit de prouver. Et d'abord, sous ce simple titre Quartier neuf, écoutez ces variations sur le quartier Malesherbes : « Le lieu fut autrefois plein de mauvaises herbes ; des balais nettoyèrent, un « jour, de tristes solitudes; on battit les steppes, les chardons, malpropres < multitudes ; on bâtit colonne, fronton froid, pilastre, péristyle ; des richards ( « vinrent édifier bâtis»es de tout style ; et des chars sillonnèrent bientôt l'opu- « lente avenue.... » Quelle virtuosité ! Mais, à propos, si c'étaient des vers !... — Avec ces natu- ralistes on no sait jamais bien où la poésie commence. Bah ! le lecteur nous par- donnera de ne pas insister. P. MARIÉTON,