Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
[ Revenir aux résultats de la recherche ]
page suivante »
262                   LA REVUE LYONNAISE
pour M. d'Artannes, un galant homme ne recherche pas un maria-
ge où il se trouverait, au point de vue pécuniaire, sous là dépen-
dance absolue de sa femme.
   — M. Chauret qui avait réussi à se faire agréer de vous, n'était
pas riche non plus, répondit Séverine du ton de quelqu'un décidé à
aller jusqu'au bout. Je suis, grâce à vous, assez riche pour deux.
Je connais M. d'Artannes, et j'affirme que l'intérêt ne le guidait pas
pas quand il vous a fait demander ma main. Quant à moi, je mau-
dirais ma fortune si je croyais, ne fût-ce qu'un moment, que je ne
puis la partager avec l'homme que j'aime, sans l'exposer à rougir.
Non, il y a un autre motif à votre refus.
  — Il n'y en a pas, balbutia le banquier.
  — Il y en a un autre, fit doucement Séverine, et cet autre, je
vais vous le dire.
   — Toi ! s'écria M. Lefort, d'une voix qui fit reculer la jeune fille;
toi !... je te défends d'ajouter un seul mot.
   — Oui, vous avez raison, dit Séverine avec un intraduisible
accent de pudeur et de dignité ; il y a des choses qui devraient pas-
ser tellement au-dessous de moi qu'elles ne puissent même offenser
mes regards; mais lorsque dans le but d'accaparer ma dot au profit
d'un intrigant, de perdre dans mon esprit un homme dont le seul
crime est d'avoir su me plaire, on vient apporter à mon oreille
une infâme calomnie contre lui, contre une jeune femme innocente,
 force m'est bien, malgré mon dégoût, d'examiner ces choses pour
les réfuter, pour les détruire, pour défendre mon bonheur !
      —-Je ne comprends pas, dit le banquier surpris.
   — Vous ne comprenez pas? reprit Séverine ; ne vous a-t- on pas
dit que M. d'Artannes avait une liaison avec une jeune fille? Ne
vousa-t-on pas dit qu'espérant m'épouser, il s'était débarrassé de la
pauvre enfant en lui donnant le peu qu'il avait, et en la mariant au
premier venu ?
   — Oui, oui, dit M. Lefort avec empressement; oui, c'est bien
cela.
   — Eh bien ! mon père, dit Séverine d'un ton de triomphe, c'est,
je vous le répète, un mensonge, une noire calomnie. Savez-vous
qui est cette jeune fille que Maurice a dotée effectivement et qu'il