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                        BENOIT P O N C E T                  '      191

vant son expression, avait, d'autres moments, le dessus. A quel-
que temps de là, le jeune architecte revenait, demandant un crédit
de quelques jours pour une livraison de dessins, vu qu'il avait
affaire importante : il se mariait. Il s'attendait aux félicitations
banales que l'usage impose en telles circonstances. — Gomment,
fit Poncet brusquement, vous êtes donc fou ! vous vous enrôlez
dans le régiment des c...? — L'autre piqué : — M. Poncet, n'êtes-
vous pas marié ? Vous serez mon colonel ! — C'était en pleine
guerre de Grimée, oh était depuis huit mois devant Sébastopol.
— « Les f... bêtes, continua Poncet, suivant sa pensée, qui ne sa-
vent pas prendre Sébastopol, quand ce serait si facile ! Ils n'ont
 qu'à y envoyer les c... Quelle armée, mon ami, quelle armée!
 Il n'en reviendrait pas un Russe ! » — Il disait cela d'un ton si
convaincu que c'était à croire qu'il n'entendait pas plaisanter.

                                  *

   C'est à Dardel qu'appartient l'étude du tracé de la rue Impé-
riale. A ce moment les fonctions d'ingénieur en chef de la voirie
n'existaient pas, et les questions d'alignement ressortissaient au
service d'architecture. Le tracé est aussi satisfaisant que possible.
   Dès longtemps, au reste, on avait la pensée d'ouvrir une rue
allant de la place.de la Comédie à la place des Gordeliers, et elle
figurait même, je crois, sur les plans d'alignement ; car lorsque
Bissuel construisit sa maison qu'il habita jusqu'à sa mort, dans la
rue Gentil, il ménagea l'impasse actuelle afin de bâtir la façade,
assez modeste, que l'on y voit, avec l'entrée d'allée sur la rue pro j
jetée. Mais les projets d'alignement furent bouleversés un grand
nombre de fois,
    La rue Impériale était prévue à vingt mètres de largeur. Savoye
 trouvait que c'était déjà beaucoup, si ce n'est trop, et Poncet aussi.
 Leur pensée, tout industrielle, était que, pour la valeur mar-
 chande des magasins, il vaut mieux que d'un trottoir, on puisse
 facilement distinguer les objets dans les montres de l'autre côté de
 la rue.
    J'ai toujours entendu dire que ce fut l'empereur qui, lorsqu'on
 lui présenta les projets, exigea que la rue fût portée à vingt-deux