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8 LA R E V U E LYONNAISE d'Hernani, le vieux Nangis de Marion Delorme, le vieux Saint- Vallier du Roi s'amuse ; mais ici ces trois générations de barbons, le père, le grand-père et le bisaïeul, ayant la prétention de person- nifier trois phases de la décadence sociale, prêtaient un peut à la parodie. D'ailleurs, un argument purement extrinsèque était venu compliquer singulièrement la question. L'étoile du réformateur de 1830 avait commencé à pâlir et on éprouvait le besoin de voir apparaître un astre nouveau. Cet astre, qui du reste était de médiocre grandeur, se leva derrière les montagnes du Dauphiné et illumina ensuite de ses.feux éphémères la nécroj)ole, trop souvent déserte, de l'Odéon. La Lucrèce de Ponsard n'était pas seulement un heureux début, une habile imitation de l'antiquité, un travail consciencieux et honorable : ce fut encore un des manifestes de l'école du bon sens, un des programmes de la restauration néo- classique, et, pour tout dire, une machine de guerre destinée à battre en brèche les remparts déjà ébranlés du romantisme. L'idole jusque -la encensée devait provisoirement céder la place à un autre fétiche, dont le culte fut bien moins durable. Hugo, déçu dans ses illusions et blessé de l'indifférence géné- rale, ne produisit plus rien sur le théâtre. Et néanmoins on raconte qu'en outre des deux pièces très curieuses insérées dans ses Quatre vents de l'Esprit, il garde en manuscrit divers drames (Torquemada, la Faim, les Jumeaux, l'Epée), des comédies (la Grand'mère, Peut-être frère de Gavroche), une féerie (la Forêt mouillée). On a même prétendu qu'il avait l'intention de faire imprimer Torquemada, mais qu'il ne laisserait jouer de son vivant aucune de ses œuvres nouvelles, le désastre des Burgraves lui ayant ôté toute confiance dans les jugements capricieux du parterre. Ces diverses compositions sont-elles effectivement toutes termi- née? quand paraîtront-elles? on l'ignore; mais il est permis de supposer sans invraisemblance qu'elles ne sauraient ajouter beau- coup à la gloire du dramaturge. V LE ROMANCIER, LE CRITIQUE, L'ORATEUR L'imagination est incontestablement (comme le dirait Taine d'a- près Montaigne) une des facultés maîtresses d'Hugo. Il n'est donc