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contenu, telle forme. Et le contenu est actif justement parce qu'il a sa
poésie, sa beauté naturelle, comme la nature a sa beauté réelle. Dans la
forme le critique retrouve le contenu non plus nature, mais art, non plus
tel qu'il était, mais tel qu'il est devenu... enrichi par ce devenir. Si le
contenu, même beau, est resté inactif dans l'esprit de l'artiste et se révèle
vicié dans la forme, à quoi sert de chanter ses louanges ? Comme litté-
rature, il n'a pas de valeur. Par contre, le contenu peut être immoral,
absurde, faux, frivole, mais s'il a opéré puissamment sur le cerveau de
l'artiste et est devenu forme, ce contenu est immortel.
      « Les Dieux d'Homère sont morts ; l'Iliade est restée... Le contenu
est soumis à toutes les vicissitudes de l'histoire. Il naît et il meurt. La
forme est immortelle ».
      Ainsi la forme est tout. Avant la forme, comme avant la création,
il y a le chaos. L'essence de l'art est le vivant, la forme. C'est pourquoi
l'art n'est pas seulement l'idéal et le beau, mais aussi le laid.
      En conclusion, De Sanctis cite ce mot de Montaigne : « Au lieu d'ar-
tialiser la nature, il faut naturaliser l'art ».

     Or, cette forme est le grand triomphe du créateur ?
     Qu'est-ce que le créateur ?
     Ici, F. De Sanctis établit une distinction entre le talent et le génie,
entre l'artiste et le poète.
     Il dit : « Ne pas admettre la médiocrité en art, voilà une idée profonde.
En effet, il n'y a pas le plus vivant ou le moins vivant ; il y a le vivant ou
le mort ; il y a le poète et le non-poète... Seul est artiste le peuple qui sait
mesurer la distance infinie qui sépare le génie du talent, la création de
l'agrégation... ».
     Cette première différence établie, différence de valeur, entre le génie
et le talent, De Sanctis en établit une autre lorsqu'il distingue le Poète
de l'Artiste.
     « L'artiste, écrit-il, est celui qui n'est pas pris tout entier par le con-
tenu qu'il veut représenter, qui, se tenant à une certaine distance de ce
contenu, le choisit comme modèle, mais ne le prend pas comme maître.
Ce qui agit en lui, c'est seulement la chaleur de l'imagination. Or il ne