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romaine, et même un peu avant, ses conseillers délibérèrent de le remarier
pour affermir la dynastie nouvelle des Bourbons. Il avait, étant encore
roi de Navarre et huguenot, épousé en premières noces, peut-être malgré
lui et certainement malgré elle, la très catholique Marguerite de Valois,
fille de Catherine de Médicis, et n'en avait jamais eu d'enfant. Ce ménage
mal assorti avait longtemps vécu sous le régime de l'infidélité mutuelle,
qui finit par aboutir à la séparation et à la rupture ouverte. Lui, devenu
roi de France en vertu de la loi sali que et renié par la majorité de ses
sujets qui lui opposait le droit religieux, avait achevé par sa conversion
la conquête de son royaume. Elle, s'était morfondue, recluse volontaire
ou non, dans un château fort de l'Auvergne, à Usson, perdue de dettes
à n'en pouvoir plus faire, et disposée à un divorce, à condition que le
Roi, son mari, consentît à satisfaire ses créanciers et lui assignât une pen-
sion digne de sa naissance et de son rang. La Cour de Rome avait tous
les moyens canoniques et toutes les raisons politiques de dissoudre, quand
elle le jugerait bon, une union qui n'existait plus en fait.
      Les difficultés venaient du Roi lui-même. Il aimait à la folie Gabrielle
d'Estrées, gracieuse et belle, mais d'une famille si fertile en femmes ga-
lantes qu'elle et ses cinq sœurs passaient — y compris son frère François-
Annibal — pour l'incarnation des «sept péchés capitaux». Il avait eu d'elle
deux fils et une fille, et il les avait légitimés, bien que l'aîné, César, fût
doublement adultérin. Ce grand roi, dont l'amour fut l'unique, mais
l'éternelle faiblesse, faisait demander à Clément VIII, en même temps
que l'annulation de son premier mariage, un service qu'il estimait égal,
sans souci de l'irrévérence du rapprochement, à celui de l'avoir absous du
péché d'hérésie. Il voulait épouser sa maîtresse et, en l'élevant jusqu'au
trône, y faire monter avec elle, comme ses futurs héritiers, la lignée de
la bâtardise et de l'adultère. Mais le pape, dans ses instructions secrètes
au nonce Silingardi, se disait résolu à s'opposer de toutes ses forces, dans
l'intérêt du Roi lui-même, à « cette pratique extravagante », convaincu
qu'elle soulèverait une nouvelle guerre civile, « le peuple de France n'ayant
pas l'habitude de supporter des taches sur ses rois ».
      Heureusement pour la paix du royaume^ Gabrielle d'Estrées mourut
subitement (10 avril 1599), et si à propos, que les uns y virent la main de