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       Depuis qu'usant du pouvoir dictatorial que le Directoire lui avait
conféré, Reverchon avait, le 19 nivôse an IV, fermé la Bourse, dont les
réunions avaient lieu dans l'ancien réfectoire de l'Abbaye de Saint-Pierre,
la place des Terreaux (alors place de la Liberté) était chaque jour, dès
l'heure de midi, envahie par une foule compacte et bruyante. Là se cou-
doyaient en plein air des négociants, des hommes d'affaires, des agioteurs,
des oisifs de tout acabit — et parmi ceux-ci nombre de gens suspects qui
passaient pour appartenir à la « Compagnie de Jésus » ou être des émigrés
rentrés. Ces deux dernières catégories d'individus avaient établi en ce lieu
une sorte de quartier général : des cafés bien connus étaient leurs lieux
attitrés de rendez-vous. Les gens paisibles ne s'aventuraient dans le milieu
de la place qu'en s'écartant avec précaution des jeunes gens à cadenettes
et munis de gros bâtons dont l'allure était loin d'être pacifique.
       Vers la fin de floréal, une fermentation plus grande que d'ordinaire
s'accusait en cette partie de la ville où se concentraient à la fois la vie admi-
nistrativej le tumulte des affaires et les passions toujours allumées de la
politique. L'arrestation de Babeuf et de ses complices venait d'être opérée
à Paris et le retour à Lyon de certains terroristes connus accréditait l'opi-
nion que la conspiration y avait des ramifications et qu'une explosion locale
avait été sur le point de s'y produire. Le bruit courait qu'à l'exemple d'une
 partie de la légion de police de la capitale, certains éléments de la garnison,
 connus pour leurs idées révolutionnaires, étaient tout disposés à se joindre
 à un mouvement anarchiste. Cet état d'esprit explique dans une certaine
 mesure les événements qui se déroulèrent dans le quartier des Terreaux le
 I er prairial an IV.
       Ce jour-là, entre onze heures et midi, un peloton de volontaires de
       e
 la 60 demi-brigade, composé de quatorze hommes et d'un sous-officier, fit,
 en tenue de campagne, son apparition sur la place et vint se ranger devant
 l'Hôtel de Ville. Ces militaires formaient l'avant-garde d'un détachement
 de deux cents hommes revenant des montagnes du Velay où, sous la direc-
 tion du représentant Poultier, il avait contribué à la dispersion du camp
    Rev. Lyonn., IV, I                                                     6