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      La lecture très attentive de cette lettre ne manque pas de susciter quel-
ques réflexions. D'abord, pas plus que les suivantes, elle ne nomme et ne
pouvait évidemment pas nommer Marat, mais les phrases que j'ai souli-
gnées, concernant l'Optique, science à laquelle Villeroy était complètement
étranger, et surtout l'expression « faire changer de face à l'Optique » per-
sonnelle et familière à Marat, ces phrases et ces expressions, dis-je, sont du
Marat tout pur sans qu'il puisse y avoir l'ombre d'un doute ; d'ailleurs nous
avons à cet égard les aveux de Marat lui-même, dans l'Introduction (page v)
de ses Mémoires académiques : « Les Découvertes que je présente au Public...
ne tendent pas moins qu'à faire changer de face à l'Optique. Pénétré de leur
importance et jaloux de les constater rigoureusement, j'en ai fait le sujet de
plusieurs Programmes, je les ai consignées dans des Mémoires particuliers,
et j'ai provoqué l'examen des Compagnies savantes. Ne pouvant paroître, je
m'en suis rapporté à quelques amis de la vérité, qui s'intéressent aux progrès
des sciences ; et ils ont choisi des Académies où je ne pouvois me flatter de
trouver beaucoup de partisans ».
      Ces « amis de la vérité » n'étaient-ce pas le comte de Maillebois à Paris,
le comte de Nogent à Dijon, Dom Gourdin à Rouen, le duc de Villeroy à
 Lyon, X... à Montpellier? Et Marat avoue que par eux il a « provoqué
 l'examen, par ces Académies, des Mémoires qu'il a envoyés à des concours
 dont il avait lui-même rédigé le sujet des programmes »! On n'est pas plus
 cynique et plus machiavélique !
       Mais comment Marat était-il entré en relations avec le duc de Ville-
 roy? Sans doute par l'entremise de quelques gentilshommes de la cour,
 dont il avait pu faire la connaissance en sa qualité de médecin des gardes de
 monseigneur le comte d'Artois, poste où sa maîtresse la marquise de
 L'Aubespine l'avait fait nommer et qu'il avait occupé durant cinq années ;
 sans doute aussi par l'entremise d'un de ses « clients » ou de ses « auditeurs »
 de la haute société, car il ne faut pas oublier qu'il exerçait la médecine à
 Paris depuis 1779 et qu'il faisait des cours et expériences de physique. Il est
 impossible de rien savoir de précis à cet égard, puisque Necker avait fait
 détruire plus de trois cent cinquante lettres saisies chez Marat, et puisque
 les archives et les papiers du dernier duc de Villeroy, guillotiné lui-même
 en 1794, ont totalement disparu dans la tourmente révolutionnaire. Une