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Gourdin, membre de l'Académie de Rouen, rhétoricien et grammairien,
s'était mis en tête de faire lui-même des expériences sur l'électricité et la
lumière, et l'on conçoit qu'il pût être flatté de voir son nom cité en bonne
place par Marat dans son « Mémoire sur l'Electricité médicale, couronné le
6 août 1783 par l'Académie de Rouen », publié à Paris en 1784.
Depuis 1779, ce Dom Gourdin, qui briguait lui aussi les suffrages des
Académies, était entré en relations épistolaires avec celle de Lyon, à la-
quelle il envoya de nombreuses lettres et dissertations sur les sujets les plus
divers, et à laquelle il fut agrégé en 1785 au titre de membre associé. Il est
important, pour la compréhension des épisodes qui vont suivre, de noter
avec soin ces relations très suivies de Gourdin, d'une part avec l'Académie
de Lyon, et d'autre part avec Marat lui-même, comme on va le voir.
En 1784, l'Académie de Rouen annonça un prix extraordinaire de
300 livres à décerner au concours sur la question suivante : « Quels seraient
les moyens de porter l'Encyclopédie au plus haut degré de perfection ? ». Le
lauréat, proclamé le 3 août 1785, fut un avocat de Nantes, M. de Cetray, et
un accessit fut attribué à un mémoire dont l'auteur, révélé par l'ouverture
du billet cacheté, se dénommait « D r Tomacereau à Versailles ». Ce nom
n'était qu'un pseudonyme, et ce mémoire, on l'a su plus tard 1 , était l'œuvre
de Marat qui, lors d'une visite que lui fit Gourdin à Paris, se plaignit de
n'avoir pas été choisi comme lauréat.
Alors, et c'est ici que la comédie commence, Dom Gourdin, de retour
à Rouen, et désireux de plaire à Marat en lui offrant une compensation
pour calmer son ressentiment, fournit lui-même, sans se faire connaître, les
fonds d'un prix de physique, qui fut annoncé dans la séance publique du
3 août 1785 pour être décerné, l'année suivante, sur un sujet ainsi conçu :
« Déterminer les vraies causes des couleurs que présentent les lames de
verre, les bulles de savon et autres matières diaphanes extrêmement min-
ces ». Le lauréat, proclamé le 2 août 1786 et nommé dans le billet cacheté
joint au mémoire couronné, était un « M. de Longchamp, avocat au Parle-
ment, Fontainebleau », lequel suppliait, « si ce mémoire est jugé digne de
1. On a d'ailleurs retrouvé dans les papiers de Marat, inventoriés chez lui après son assassinat, la
minute de ce mémoire sur l'Encyclopédie.