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il y eut deux tirages portant les uns la date de 1609, les autres celle de 1610. Il y a deux
ans, un des grands libraires de notre ville me montra l'exemplaire, peut-être unique,
qui subsiste de ce premier tirage de 1609. Ce précieux volume avait une délicieuse
reliure de l'époque en maroquin vert orné de feuillages aux ors effacés. Je ne sais
quelle fut la Philothée qui témoigna ainsi son admiration pour ce chef-d'œuvre nouvel-
lement né qui devait avoir quarante éditions du vivant même de son auteur. En 1616,
le Traité de VAmour de Dieu sortit des mêmes presses et fut accueilli avec joie par les
âmes religieuses. Quant aux ouvrages posthumes, les Entretiens et les Epitres spirituelles,
ils furent confiés par Madame de Chantai à Vincent de Cœursillys. Les premières
parurent en 1626 et les seconds en 1629. De nombreuses lettres de la sainte ont trait à
ces éditions.
       Nous rencontrerons, durant les derniers jours du saint, ses amis lyonnais, du
 moins les principaux, et nous les saluerons au passage. A chacun de ses séjours le
 saint évêque était l'objet d'un accueil empressé de leur part. Il s'en plaignait aimable-
 ment dans l'une de ses lettres à un évêque qu'il n'avait pu aller voir : « Je n'en eus
jamais le loisir, à cause de l'empressement des visitari et visitare. Certes ces grandes
 villes sont importunes, pour cela au moins, pour les pauvres villageois comme moi
 qui n'y sont point accoutumés ».
       Mais surtout Lyon posséda, dès 1615, un monastère de religieuses de la Visita-
 tion. C'était le second de l'ordre naissant et la première fondation jetée en France,
 Sous l'Ancien Régime et plus encore peut-être au moment de la Réforme catholique,
 les couvents exerçaient une influence considérable sur les mœurs. Bien des parents
 comptaient plusieurs vocations religieuses parmi leurs enfants nombreux. Ces monia-
 les, cachées derrière leurs grilles devenaient les confidentes et souvent les « directeurs »
 des membres de leur famille. Je ne puis vous retracer l'histoire si curieuse de cette
 fondation, même dans ses grandes lignes, cela nous conduirait trop loin. Les fonda-
 trices, Madame des Gouffiers, Renée Trunel, veuve de Monsieur d'Auxerre, lieute-
 nant général au baillage de Forez, et Madame Isabeau Colin éprouvèrent de grandes
 difficultés : leur confesseur, M. Lourdelot, les ayant contraintes d'établir un ordre
 similaire sous le vocable de la Présentation, ordre dont l'existence d'ailleurs ne dépassa
 pas six semaines. Après ce désastre, monseigneur Denis Simon de Marquemont,
 archevêque de Lyon, appuya leur démarche auprès de saint François de Sales dont il
 était l'ami. Il envoya son propre carrosse pour chercher les religieuses, avec une dépu-
 tation composée de M. Menard, vicaire général, chanoine et sacristain de l'église
 Saint-Nizier, du chanoine de Médio, de Saint-Nizier aussi, et de Mesdames des
 Gouffiers et Colin. Madame de Chantai emmena comme coopératrices les mères
 Marie Jacqueline Favre, assistante et directrice, Peronne-Marie de Chastel, économe,
 dépensière, surveillante et robière et Marie Aimée de Blonay, conseillère, sacristine,
 portière et lingère. L'établissement eut lieu le 2 février 1615 dans la maison que
 Madame d'Auxerre avait achetée du sieur Olier marchand épicier, rue du Griffon,
 sur les Terreaux, près de Saint-Claude, paroisse Saint-Pierre. Madame de Chantai
 resta à Lyon jusqu'à la fin du mois d'octobre 1615 et confia sa communauté à la Mère