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 (Livre de VEcclésiastique autrement appelé la Sapience de Jésus) après qu'il
se fût servi des fontes achetées à Granjon, la « Cursive françoise », comme
l'appelait, cent ans plus tard, Pierre-Simon Fournier, cette lettre pittores-
que, accidentée, ne manque ni d'imprévu ni d'élégance ; il y a là, comme
dans les italiques de Garamond, des ligatures, des rondeurs d'une grâce
infinie ; tout de même, ce ne fut point une invention géniale, et l'on se lassa
vite de ce caractère par trop fantaisiste dont devaient s'accommoder beau-
coup mieux que nous les hommes de la Renaissance, puisqu'il reproduisait
fidèlement leur indéchiffrable écriture.
      Robert Granjon grava encore à Lyon d'autres caractères dont firent
usage Rollet, Ausoult, Gryphius et Jean de Tournes ; puis il gagna Rome
et entra dans l'atelier de Basa. Les Médicis, qui fondaient en ce moment à
Rome une imprimerie orientale, firent des avances à Granjon, avances
royales, car c'était un écu d'or pour chaque lettre dont il graverait le poin-
çon, « sans compter, dit-on, un logement et un appointement fixe de dix
écus par mois ». Renchérissant encore sur ces propositions splendides,
Grégoire XIII lui offrit trois cents écus par alphabet.
     A ce propos, il n'est pas du tout indifférent de connaître les moyens
d'approvisionnement dont disposaient les imprimeurs lyonnais du xvie
siècle.
     Quant aux caractères, si les premiers typographes furent forcés de les
faire graver eux-mêmes quand ils n'en étaient point les propres artisans,
ceux du xvie siècle eurent de bonne heure le moyen d'en confier la fonte à
des ouvriers dont c'était le métier. Dès 1515 et peut-être plus tôt il y eut, à
Lyon, des « fondeurs de lettres en l'imprimerie », et de véritables dynasties
de ces petits industriels se succédèrent jusqu'à la fin du siècle : les Juste, les
Bozon, les Bourcicaud, et surtout les Bouilliand qui, vers 1580, jouissent
d'une grande vogue et chez qui s'approvisionnent tous les imprimeurs de
Lyon.
     A Paris, après la création, en 1540, de la Fonderie Royale, les Le Bé,
Thiboust, les Sanlecque, ouvrirent à leur tour des fonderies qui répandirent