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qu'aussitôt que j'aurai des nouvelles de Saint-Pétersbourg, votre Emi-
nence les connaîtra dans toute leur teneur. Ma confiance en elle n'a pas
de limites et je sais que je puis compter sur sa bonté et sur sa discrétion
dans la mesure du possible ; voilà pourquoi je ne fais pas de mystère avec
elle. Si elle daigne m'interroger, elle aura de moi les renseignements les
plus précis sur n'importe quelle question » ( n ) .
Le désaccord liquidé, on reçut avant la fin de la semaine, le 23 ven-
tôse (14 mars, mercredi), les lettres du nonce, Mgr Arezzo ; le voyage du
courrier Livio Paloni avait donc duré soixante-dix jours ; le pli de Mgr
l'archevêque de Séleucie lui avait été remis le 27 janvier. A cette aurore
du xixe siècle, on ne soupçonnait pas la création des chemins de fer et
de la télégraphie sans fil. Le prélat débutait par peindre les dispositions
des esprits, le courant des idées ; à son sens, le mouvement spontané de
l'Empereur avait été excellent ; il aurait affirmé très haut qu'on avait bien
fait d'arrêter Vernègues, afin de l'empêcher de nuire ; mais le prince
Adam Czartoriski avait appuyé le sentiment contraire et il ne serait pas
l'unique adversaire de la conciliation ; l'archevêque de Mohilew Siestrzen-
cewicz, furieux contre les Romains, depuis que Pie VI lui avait refusé le
chapeau, malgré le vœu de Catherine II, et que ses avances pour la recons-
titution de la Compagnie de Jésus avaient déplu, ne manquera pas d'indis-
poser la cour, comme il l'a déjà tenté, en particulier contre le procureur
général de ces religieux : le père Angioloni, trop ultramontain et trop
indocile à ses combinaisons.
Cependant, avant que l'opposition anti-française ait dressé ses
batteries, le chef du cabinet, dont les tendances répugnaient à l'agression,
avait obtenu une solution amiable, pacificatrice et sauvegardant les droits
des partis. On offrait au Souverain Pontife, s'il daignait l'agréer, de pro-
noncer une sentence sans appel ; à cet effet, réunissant une commission
de jurisconsultes, désignés à son gré, après leurs délibérations et sur leur
avis, il jugerait, en pleine compétence, si le prisonnier du château Saint-
Ange, devenu sujet russe par son choix et par un diplôme de naturalisation,
n'a pas cessé d'être soumis aux articles du code pénal de la patrie à laquelle
il a renoncé. Le nonce suppliait qu'on ne s'attardât pas à des objections
inopportunes. De son côté, le 15 mars, le comte Cassini, qui était avec le