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la Grèce revenue au bon temps de jadis, au temps d'avant M. Venizelos.
Le ministre Rhallys n'a vécu qu'un moment : le ministère Calogero-
poulos survivra-t-il à la conférence de Londres et à la désillusion qui
l'attend à son retour? Ne voit-on pas déjà s'apprêter un cabinet Gounaris
et derrière M. Gounaris, qui présentant tout de même plus de surface
résistera peut-être un peu plus longtemps, ne voit-on pas se profiler
l'ombre de M. Stratos ? La vie politique grecque est en vérité redevenue
normale, du moins aux yeux de ceux qui en tirent le plus clair de leur
subsistance.
Aux raisons qui viennent d'être exposées de l'insuccès électoral
de M. Venizelos, il en faut ajouter d'autres encore. M. Venizelos ne semble
pas avoir été bien servi par ses amis. Quand on connaît la largeur de son
esprit, on a quelque peine à comprendre que, même dans la passion des
mêlées électorales, on ait pu l'affubler du nom de Dictateur. S'il a une
volonté très nette, très réfléchie, personne n'a moins que lui le goût de
la tyrannie. Mais il ne faut pas oublier que pendant près de deux ans
M. Venizelos a été éloigné de Grèce d'une façon presque continuelle :
sa place était à Paris et à Londres et c'est à grand'peine que chaque année
il pouvait pendant quelques semaines s'échapper et rentrer à Athènes.
Il s'est donc trouvé dans l'obligation de remettre entre les mains de ses
amis politiques toute l'administration du royaume et la politique intérieure
du pays. Il semble que dans leur zèle ses amis n'aient pas toujours répugné
à la manière forte et ne se soient pas privés d'exercer certaines pressions,
du moins on le prétend. Il est certain en tout cas que les ennemis politi-
ques de M. Venizelos surent exploiter contre lui et au besoin amplifier
et exagérer les fautes de son entourage politique. Il est bien certain qu'ils
ne se gênèrent pas pour ajouter à la vérité. Tout de même il paraît bien
à peu près établi que les Venizelistes aient eu parfois la main un peu dure
et bien entendu c'est M. Venizelos qui en a pâti.
On s'étonnera peut-être dès lors, si ces pressions ont réellement
été exercées, que la défaite du parti venizeliste ait été aussi complète.
C'est que les électeurs en Grèce sont plus sincères qu'on se l'imagine
généralement. Il suffira, pour en avoir la preuve, de rappeler très briève-
ment l'histoire politique de ces dernières années.