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                        L ECOLE LYONNAISE                          I75

           )e ne souhaitte encore point mourir,
           Mais quand mes yeus je sentiray tarir,
           Ma voix cassée, et ma main impuissante.
           Et mon esprit en ce mortel séjour
           Ne pouvant plus montrer signe d'amante,
           Prirav la mort noircir mon plus clcr jour.

   Je ne connais guère de plus touchante ni de plus belle
modulation que ce passage des deux premiers quatrains au
premier tercet. Louise était musicienne : ils étaient tous
musiciens dans l'école. Mais ce fut cette fois la mort qui ne
répondit pas à l'appel ; et quand il s éloigna pour ne plus
revenir, la « Belle Cordière » était jeune encore ( i ) . Le
temps, en apaisant les regrets, amena-t-il le repentir? Mais
jusque dans le repentir, elle garda l'orgueil de son amour,
et le roman se termina par ce hardi défi :

                                XXIV
           Ne reprenez, Dames, si j'av aimé!
           Si j'ay senti mile torches ardentes,
           Mile travaux, mile douleurs mordantes,
           Si en pleurant j'ay mon tems consumé,
           Las ! que mon nom n'en soit par vous blâmé.
           Si j'ai failli, les peines sont présentes,
           N'aigrissez point leurs pointes violentes;
           Mais estimez qu'Amour, à point nommé,
           Sans votre ardeur d'un Vulcan excuser,
           Sans la beauté d'Adonis acuser.
           Pourra, s'il veut, plus vous rendre amoureuses
           En ayant moins que moi d'occasion,
           Et plus d'estrange et forte passion,
           — Et gardez-vousd'estre plus malheureuses!


   (1) On ne connaît pas avec exactitude la date de sa naissance, et on
s'est accordé longtemps à la placer en 1524 ou 1525. Des recherches
plus récentes ont établi qu'on pouvait la reculer presque d'une dizaine
d'années, jusqu'aux environs de 1515 ou 1520. Cf. Charles Boy,
Œuvres de Louise Labè; Paris, 2 vol. in-18, 1887. A. Lemerre.