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32 UN CONFLIT D ' H O N O R É D'U1U ; H mettent sous les yeux. Une escouade arrivait dans un hameau ou une ferme isolée, parlait insolemment aux pau- vres gens terrifiés, nourrissait à discrétion ses chevaux de foin et de gerbes de seigle, assommait une ou deux brebis, tuait des oies et des poules à coups d'arquebuse, enfonçait les coffres, les placards et les caves qu'on faisait mine de ne pas ouvrir, prenait du pain, du vin, du lard, des œufs, des fromages; une partie de ces provisions conquises à la pointe de l'épée était portée au château de Lalière pour la table du capitaine. Il n'était presque jamais question d'in- demnité; il semble que M. de la Mollière et M. de Gondras en usèrent seuls avec une certaine modération et payèrent quelquefois la dépense de leurs hommes. Les autres se moquaient de ceux qui prenaient la liberté de leur deman- der de l'argent, ou même ils faisaient pis. Un paysan ayant dit qu'il serait juste de lui payer quelque chose pour les dégâts commis en sa maison, un soldat « luy voulust bailler un coup d'espée ; et de faict ung d'eulx luy baillât ung sy grand coup de poing par la teste, qu'il la pensa ramasser par terre ! » Quand le bois venait à leur manquer, ils abat- taient les barrières, et même ils démolirent une grange pour se chauffer. Quelques-uns remontèrent le vestiaire de leur honnête ménage en volant des manteaux, des pour- points et jusqu'à une robe de femme. A Mauvernay, près de Saint-Pierre-Laval, une jeune fille fut menacée de ce que vous devinez bien, et il fallut, par prudence, l'éloigner de convoitises brutales. Pendant ces jours de licence, les deux la Guiehe allaient et venaient de leur château de Lalière au bourg de Saint- Martin, position stratégique de premier ordre, assise sur le grand chemin de Paris. Ils en avaient fait le centre de leurs opérations, et y avaient établi jusqu'à neuf barrières eu corps