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446 VOYAGE A LYON DE. FRANÇOIS VINGHANT qu'elle emporte l'honneur sur toutes les dames de lettres, et à laquelle a souvent envoyé lettres ce grand historien Justus Lipssius, quy en a receu d'elle. C'est en fin le mira- cle de nostre siècle. Son père qui, sur quelque occasion, s'estoyt retiré à Lyon, luy fit faire un habit de capucin pour l'exciter à la pitié, et continuer les estudes qu'elle avoit de son enfance commencées en Espaigne. Elle sçavoit, à l'eage de 12 ans, le latin, le grec et l'hébreu, la philoso- phie, puis l'art de discourir. Elle soustint en l'an 1606, le 16 février, une dispute publique sur la philosophie spécu- lative et morale, où se trouvèrent grands prélats et aultres gens de lettres, lesquels furent bien estonnés d'ouyr son éloquence et ses conclusions. Son père volut que la dispute, se feit à ce jour qui est dédié à Ste Julienne, parce que c'est le jour de sa naissance. De mon temps que j'estoy à Lyon, elle estudioit en droit. Je crois qu'en ce temps que j'escrit cecy, elle at accomply ceste estude, avec celle de la théologie (1). LE CHIEN DE CORNÉLIUS AGRIPPA. — Estant donc party de Lyon (2), l'on laisse à main droite, près de la ville, l'hostellerie où Henry-Corneille-Agrippa, homme de grand estude, estant envoyé par l'empereur en embassade au Roy de France, mourut. Il estoit suspect de Negromancie. Aul- cuns disent couvertement qu'il estoit le plus grand sorcier de son eage. Il avoit toujours chez luy un petit chien noir, qu'il mesnoit de toute parte ; et il le faisoit coucher sur son lict. Estant proche de la mort, il osta audit chien un golier (1) L'auteur raconte ici une excursion qu'il a faite à Vienne. (2) C'est-à -dire : en partant de Lyon, quand on part de Lyon.