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74                  ^CHRONIQUE DK JUIN

   Qui de nous n'a connu la fière mine de mousquetaire du
régisseur Taravel, l'enfant chéri de nos salons qui s'en
disputaient les faveurs ? Qui ne l'a entendu, de sa voix claire,
sonnante et mordante, marteler avec énergie ses fantaisies
tantôt macabres, à la Villette, tantôt amoureuses, à la
Piron ; la tête fièrement rejetée en arrière, s'accompagnant
lui-même au piano, tourné de trois quarts vers son audi-
toire attaché à ses lèvres. Xavier Privas secoua, il y a
tantôt sept ans, les paperasses du régisseur Taravel, il en
brisa la plume pour prendre celle du poète de la Chanson
et s'envola pour Paris qui vient de le sacrer prince des
Chansonniers, comme il avait sacré Verlaine, Mallarmé
et Dierx, princes des poètes. Quelle carrière, rapidement
couronnée de la plus flatteuse des gloires !
   Un autre artiste lyonnais, compositeur de talent, Eugène
Arnaud-Picheran, qui tint avec beaucoup de verve le bâton
de chef d'orchestre- du Casino et se lit applaudir si souvent
dans nos salons pour ses compositions pleines de charme
et de mélodie, vient d'obtenir à Paris, aux Folies-Drama-
tiques, dont il est depuis deux ans le chef d'orchestre, un
joli succès, le 14 juin, avec un vaudeville-opérette en trois
actes dont il a fait la musique « Madame Pistache ». Cette
œuvre badine a été très bien accueillie par la critique et
marche gaillardement vers sa cinquantième.
   Après les poètes et les musiciens, passons aux hommes de
lettres.
   Deux livres nous apparaissent en ce mois. Je ne parlerai
pas du troisième volume de la Nouvelle Histoire de Lyon,
de A. Steyert, œuvre monumentale que tous nos érudits
ont déjà entre les mains. Je signalerai aux amis des lettres :
 Ceux de Belfori, de Gabriel Gerin, notre si aimable et si
séduisant compatriote, l'auteur si goûté d'une précédente