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394 PIERRE PUVIS DE CHAVANNES Faut-il donc déclarer qu'il est bien lyonnais, ayant encore dans cette ville de nombreux parents et, ce qui est mieux, des amis, hommes de talent et de mérite ; sa manière de vivre, même, pourrait encourager à l'affirmer : simple et régulière, modeste jusqu'à la haine de la réclame, opiniâ- trement laborieuse et aristocratiquement réservée; ee sont là , dit-on, des qualités dont l'ensemble ne se retrouve que chez les vieilles familles habitant entre le Rhône et la Saône. N'est-ce pas aller un peu loin ? Enfin, n'est-il pas du pays des mœurs sévères, où la mère fervente prie pour son enfant et le fait prier avec elle, où elle garde le jeune homme plus jalousement du péché que de la faute, c'est-à -dire qu'elle lui apprend d'une manière ineffaçable à lutter contre lui-même et à écouter sa conscience, si bien que plus tard, quelle que soit la direction prise, il retrouvera toujours en lui, l'impératif moral qui fait la dignité de la vie, et l'amour de l'idéal qui en fait la beauté ? Cette influence inconsciente et invisible des mères lyonnaises aurait donné une ten- dance toute particulière à nos artistes et à nos penseurs, tendance que nous avons cru reconnaître dans l'œuvre entière de Puvis de Chavannes. Si cela était, ne faudrait-il pas souhaiter que du haut de Fourvière, les dévotes mères veillent et prient toujours sur la ville grise qui dort dans les ténèbres de la vie maté- rielle, comme Geneviève veillait et priait sur Paris endormi.