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24O CHRONIQUE DE FÉVRIER 1899 Le 15 février, terrible drame rue de la République. Un lieutenant du 159e, Abadie, rendu fou par son attachement inconcevable pour une femme sans cœur, qui se fait appeler, pompeusement Cleo de Bouckart, pour ne pas jeter une partie de son déshonneur sur sa famille, frappe cette femme de trois balles de revolver, chez elle, après s'être sauvé de sa garnison enfouie sous les Alpes, et se tue à côté de sa victime. On a cherché à transformer en héroïne de roman cette créature vulgaire, qui avait déjà vu, après maints avatars à la Cour de Roumanie, un premier amant, ruiné, chassé de sa famille qui occupe une haute situation dans ce pays, se tuer à ses pieds, rue Mercière. Elle gît sur un lit de l'Hôtel-Dieu et n'en sortira que morte ou paralysée. Le 20 février, affaire Max Régis devant la Cour d'assises de Grenoble; elle n'offre aucun intérêt, les principaux inculpés faisant défaut. Ajoutons encore quelques assassinats d'Italiens à la Guillotière. Voilà à quoi se'réduit cette chronique judiciaire. Mais il est d'autres menus faits que nous devons enre- gistrer. Tout d'abord le tirage au sort, qui n'offre du reste plus aucun intérêt de nos jours où tout le monde est peu ou prou soldat. Où est l'heureux temps où nous promenions triompha- lement nos numéros flamboyants et nos flots de rubans multicolores derrière une musique enragée et un tambour asthmatique ? Le n° 1 était hissé à rebours sur un âne et conduit par les rues de la ville par l'heureux possesseur du numéro le plus élevé. Et c'était, après la fête, les pleurs du réveil quand, après les vapeurs dissipées des orgies de la