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                      CHRÉMQUE DE FEVRIER 1 8 9 9            ^33

fonctions représentatives et une affabilité affectée de grand
seigneur en redingote, daignant sourire à son peuple. Je
me le rappelle encore au camp de Sathonay, quand il vint
y saluer le drapeau du 200e de ligne partant pour Mada-
gascar. Pauvre Jiooe ! Que de morts il a semés sur les routes
improvisees.de la grande île, aujourd'hui française ! Son
colonel n'est plus et le Président de la République meurt à-
son tour ! Au moment où M. Hélix Faure descendait de
landau pour passer la revue des troupes, il vit, comme
d'habitude, une nuée de photographes, l'appareil braqué sur
lui. Le Président avait coutume de s'arrêter quelques
secondes, chaque fois qu'il se trouvait en présence de cette
batterie d'un nouveau genre, afin de laisser le temps aux
opérateurs de saisir son beau salut protocolesque.
   A Sathonay, il s'avance vers nous et nous dit en souriant :
« Vous allez, Messieurs, m'ajouter à'votre collection des
présidents !... Ht... après moi, mon successeur... ! » Nous
nous inclinâmes, souriant à notre tour.
   Pauvre Président ! il était loin de croire que sa prophétie
se réaliserait si tôt.
   On dit qu'il est mort -du chagrin causé par les attaques
épouvantables renouvelées sans cesse contre l'armée et de
son désespoir d'être impuissant, de par les lois, à les-
chatier comme il l'eût souhaité. Si cela est vrai, M. Félix
Haure est mort en bon citoyen, en patriote. On croyait
qu'il n'avait qu'un ruban rouge, il avait aussi un cœur de
Hrançais.
   Quant à M. Loubei, son successeur, c'est un Dauphinois
du Midi ; c'est tout ce que nous pouvons en dire, préférant le
juger à ses actes futurs que d'après l'impression irraisonnée
du moment. Du reste nous ne tarderons pas à le voir tra-
verser notre ville, quand il ira répondre à l'invitation de ses-
compatriotes de Grenoble.
 N° 3. — Mars 1895.                                     JÔ