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LETTRES DE L ' É C O L E NORMALE 405 santé. C'est un excellent camarade que je ne reverrai peut-être pas d'ici à bien longtemps, quoique nous devions tous deux revenir plusieurs fois à Paris, mais probablement à des époques différentes. Je lui ai donc dit adieu comme à ceux que l'on quitte sans savoir où on les rencontrera de nouveau. C'est ainsi qu'après avoir été élevés ensemble, nous nous dispersons presque sans espérance de nous serrer de nouveau la main. Mais au moins lorsqu'on s'est estimé mutuellement on garde l'un de l'autre un bon sou- venir et c'est quelque chose. J'ai appris ces jours-ci une chose qui m'a bien fait de la peine. Mon cher Olivaint, dont je crois vous avoir déjà parlé, a écrit à sa famille qu'il était toujours malade, et qu'il renonçait à l'agrégation. C'est le professeur d'histoire de Grenoble, et le meilleur ami que je me sois fait à l'Ecole, il est pour moi d'un dévouement sans exemple ; c'est aussi un jeune homme bien distingué pour le talent. Sa maladie l'a empêché depuis quelque temps de m'écrire, mais il m'a promis de ne pas passer à Lyon sans aller vous voir et vous parler de moi. Recevez le, je vous prie, comme un de mes plus chers amis, comme il est très simple vous n'auriez pas besoin de cérémonies ni de frais pour lui faire quelque politesse, comme par exemple pour l'inviter à dîner s'il s'arrête assez pour cela; je suis sûr que vous serez charmés de sa bonté. Je l'ai bien regretté cette année, il m'a manqué bien des fois, et je me suis rappelé bien souvent, les larmes aux yeux les longues conversations que nous avions eues ensemble, en nous promenant le long du mur de la cour, ou dans sa petite chambre. Je voudrais bien que mon frère fît sa con- naissance, et comme j'en ai déjà parlé à Olivaint, je sais qu'il y est tout disposé. Il m'est utile même de loin, il